Deux remarques sur le rôle des certificats dans les MOOC

DiplomaDans le billet d’aujourd’hui, j’aimerais faire deux remarques, toujours sur la question de la place du certificat dans les MOOC. La première est relative à la récompense symbolique que représente le certificat, qui à mon sens est l’un des principaux éléments différenciant les MOOC des Open Coursewares, même quand le certificat n’a aucune valeur sur le marché du travail. La seconde notion que j’aimerais discuter est celle de l’autoformation d’accompagnement (proposée par le sociologue des loisirs Dumazedier). Elle permet de comprendre, à mon sens, pourquoi des personnes très instruites peuvent s’engager dans des MOOC.

La notion de récompense symbolique peut expliquer pourquoi nombre de participants portent un intérêt personnel au certificat alors même qu’ils n’ont aucune intention de réinvestir le contenu du cours dans leur vie personnel ou professionnelle. Nous avons vu plus spécifiquement que le certificat représentait pour certains participants l’équivalent d’une carotte, les aidant à maintenir leur motivation tout au long du cours, et ce bien qu’ils n’envisagent pas de montrer ce certificat. L’existence du certificat jouerait sur le maintien de la motivation tout au long de la formation, c’est-à-dire la persistance de la motivation au sens de Vallerand & Thill (1993), y compris chez les participants n’envisageant pas de l’utiliser dans un contexte professionnel. Il permet d’une certaine manière de faciliter la fixation d’un but défini. Il aide au maintien de la persistance de la motivation, mais aussi à la direction de cette motivation. En d’autres termes, il aide le participant à orienter ses actions vers un objectif déterminé.

Si on aborde la question du point de vue de l’abandon en formation, l’absence de certificat, ou l’impossibilité d’obtenir l’éventuel certificat, quelle qu’en soit la raison, revient à faire disparaître l’un des paramètres clef jouant sur la persistance au sein de la formation. D’après les différents modèles développés notamment dans le cadre des travaux sur l’abandon en formation à distance, la disparition de ce paramètre rend la persistance plus sensible aux événements extérieurs que peuvent représenter les responsabilités familiales ou professionnelles. Les recherches d’Arendt & Shelton (2009) montrent que l’un des principaux inconvénients des Open Coursewares aux yeux de leurs utilisateurs réside dans l’absence de certification associée à l’apprentissage. En proposant un certificat, les MOOC disposent d’un ingrédient qui fait défaut à la plupart des projets d’apprentissage en ligne : un objectif clairement défini.

Une autoformation d’accompagnement ?

Les enquêtes montrent qu’un certain nombre de participants vouent un intérêt personnel au certificat, tout en étant confrontés dans le cadre de leur activité professionnelle à la thématique du MOOC, et alors même qu’ils n’ont été que peu, voir pas formés à la question. Nous avons noté que les personnes les plus enclines à déclarer porter un intérêt au certificat étaient celles qui possédaient déjà quelques notions sur le sujet, et non les débutants complets ou les participants ayant une certaine maîtrise du domaine. Ces différents éléments m’ont amené à formuler l’hypothèse selon laquelle l’intérêt personnel pour le certificat pourrait être motivé par la volonté de formaliser par l’obtention du certificat de la bonne maîtrise de connaissances ou compétences utilisées dans la vie professionnelle. Cette considération nous amène au concept d’autoformation d’accompagnement proposé par Dumazedier (2002, p.70) ; il désigne les pratiques visant à « compléter, corriger l’action éducative limitée ou illusoire de l’institution » ; elle peut concerner des personnes très instruites.

La formation initiale ne permet pas d’acquérir l’ensemble des connaissances ou compétences requises à l’exercice de l’activité professionnelle, l’écart entre les qualifications obtenues à l’issue de la première et celles requises pour la seconde constituant un objet de recherche à part entière (cf. les travaux de Livingstone sur le education-job gap). Ce cas pourrait concerner aussi bien des participants n’ayant pas reçu de formation sur la thématique du cours que ceux qui ont reçu une brève formation, mais qu’ils jugeraient trop superficielle. On peut émettre l’hypothèse que pour nombre de personnes, le besoin de compétence (Deci & Ryan) ne soit pas satisfait par ce mode d’apprentissage.

Dans le cas particulier des participants qui ont cherché à s’autoformer sur ces sujets, on peut émettre l’hypothèse selon laquelle certains d’entre eux s’intéressent au certificat car ils ne feraient pas confiance à leur propre processus d’autoformation. Dans le cas de figure que l’on pourrait appeler la formalisation des apprentissages informels, le participant peut estimer que les apprentissages informels sont incomplets car insuffisamment structurés ; ils cherchent une évaluation externe de leurs acquis, composante qui fait défaut à toute autoformation qui ne serait pas éducative. Le caractère hétérostructuré des xMOOC et l’évaluation correspondante permettrait de palier au défaut de structuration de leurs apprentissages informels. Bon, pour le moment ce n’est qu’une intuition, et il faudrait creuser dans cette direction pour corroborer tout ça, mais je pense qu’on tient le bon bout …

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