Des certificats de MOOC sur le CV

DiplomaLa semaine dernière, j’étais à Lille à l’occasion du colloque e-formation 2018 organisé par le laboratoire CIREL. J’ai participé à plusieurs symposiums, le premier sur l’utilisation des certificats et attestations de MOOC dans le monde de l’entreprise, le second sur le MOOC Gestion de Projet. Quelques mots sur ces interventions.

Les MOOC sont caractérisés par une grande hétérogénéité de logiques, conséquence probable de la relative absence de cadre réglementaire ; dès lors, les certificats n’ont pas toujours vocation à valider des acquis. Ensuite, il peut être relativement facile d’obtenir l’attestation sans avoir consulté les ressources du cours en amont, ou en les consultant de manière stratégique, de façon à minimiser l’investissement temporel dans la formation.

Ces considérations soulèvent deux questions. Tout d’abord, quelles sont les fonctions attribuées par les concepteurs aux certificats de MOOC, et dans quelle mesure les utilisations qui en sont faites sur le marché de l’emploi par un certain nombre d’apprenants correspondent-ils à des détournements de leur fonction initiale ? Ensuite, dans quelle mesure la structure de ces dispositifs, et en particulier des activités évaluées, favorise-t-elle l’apparition de stratégies visant à obtenir le certificat du cours tout en minimisant son investissement temporel ?

Pour répondre à ces questions, soixante-dix entretiens semi-directifs ont été réalisés avec d’une part des utilisateurs de MOOC, et d’autre part des concepteurs de MOOC. J’ai confronté points de vue d’apprenants et de concepteurs pour mieux caractériser la diversité des fonctions qui sont attribuées aux certificats tant par les uns que par les autres. J’aborde la question des dissonances qui peuvent exister entre les représentations de ces deux types d’acteurs quant à la fonction du certificat. Rares sont les enseignants qui pensent le certificat de sorte à ce qu’ils valident des acquis. Bien souvent, celui-ci ne vise qu’à maintenir la motivation de l’apprenant jusqu’au terme de la formation. J’ai confroné ces points de vue d’enseignants aux usages qui sont parfois faits des certificats et attestations, comme signal sur le marché de l’emploi.

J’ai poursuivi la réflexion par une étude des caractéristiques de 119 MOOC de la plate-forme France Université Numérique, avec une centration sur les questions d’évaluation. Ce travail s’inscrit dans la lignée des rares analyses de dispositifs publiées dans la littérature scientifique. Pour ce faire, nous avons mis au point un programme collectant automatiquement dans les cours en ligne l’information désirée. Ce logiciel m’a permis de déterminer la nature des évaluations mobilisées pour obtenir le certificat, leur nombre, ainsi que des paramètres comme le nombre de tentatives autorisées pour un exercice donné. Il apparaît que l’ingénierie pédagogique mise en place  favorise l’émergence des schèmes d’utilisation qui consistent à maximiser les chances d’obtenir le certificat tout en minimisant l’investissement dans la formation. J’ai mis perspective les résultats issus de ces analyses avec le débat toujours vivace sur la reconnaissance des certificats des MOOC, et plus généralement de leurs attestations de réussite, sur le marché de l’emploi.

Après, je suis intervenu également dans le symposium consacré au MOOC Gestion de Projet. J’ai commencé par souligner que les analyses de traces d’interaction (Kizilcec et al., 2013; Anderson et al., 2014) invitent à dépasser une vision binaire des utilisateurs de MOOC, entre des certifiés qui réaliseraient l’ensemble des tâches prescrites, et des non-certifiés n’obtenant ni attestation gratuite, ni certificat payant, dont l’activité dans le MOOC serait négligeable. Ces derniers utilisateurs, qui représentent la vaste majorité des inscrits, mettent en place des schèmes d’utilisation qui méritent l’attention de la communauté scientifique. J’ai suivi une méthode mixte; des analyses de traces, croisées à des éléments issus d’enquêtes socio-démographiques, ont permis de mettre en évidence l’existence de divers schèmes d’utilisation du cours parmi les non-certifiés, que nous avons caractérisé et interprété via des entretiens semi-directifs.

Voilà, c’est tout pour aujourd’hui, je vous mettrai sans doute les powerpoints en ligne, et une ou deux interviews que j’avais faites dans le temps avec de célèbres concepteurs de MOOC (comme Marjorie Castermans du MOOC Spice Up Your English), que j’ai eu la chance de rencontrer à ce colloque.

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