La mise en place d’une grande palette de fonctionnalités de gamification (ou ludification) est désormais un classique dans les LMS (Learning Management System, comprendre ENT dans le monde universitaire). Alors même que l’on se sert de plus en plus de ces outils pour faire la formation à distance (que de collègues s’y sont mis bon an mal an à cause de la pandémie !), on reste encore trop cantonné je trouve aux usages habituels. Déposer des supports de cours, collecter des copies, etc., sans vraiment utiliser à plein les logiques sociales, les fonctionnalités d’engagement qui peuvent y être associées. Aujourd’hui, je fais un petit tour d’horizon de ce que j’ai vu sur quelques plateformes du privé (sur le plan de la gamification), et même sur Moodle, pour inspirer ceux qui aimeraient traduire cela dans l’enseignement supérieur (si c’est pertinent et pas juste un gadget de plus).
On trouve des fonctionnalités de gamification aussi bien dans des plateformes grand prisées du monde de l’entreprise, comme 360Learning, Coorpacademy ou Beedeez, qui ont le vent en poupe auprès des investisseurs, que pour des plateformes traditionnelles comme Moodle. Car elles sont devenues un standard de l’industrie du e-learning, elles me semblent désormais incontournables à termes même pour l’enseignement supérieur.
Côté privé, je parle de Coorpacademy, de 360Learning ou de Beedeez, car ils constituent des acteurs majeurs de la formation d’adultes depuis un certain nombre d’années. Ainsi, 360Learning a récemment levé plus de 200 millions de dollars pour financer son expansion à l’étranger (la focale est plus sur l’apprentissage social que sur la gamification, mais les deux vont de paire). Les levées réalisées par les autres entreprises, quoi que moindres, sont suffisamment importantes pour que ces entreprises soient considérées comme dignes d’intérêt.
La question des badges et classements d’apprenants semblent constituer des incontournables (Figure 1). Ainsi, dans le cas de 360 Learning, un « leaderboard » permet de visualiser en temps réel les étudiants les plus engagés, reprenant au passages les codes des compétitions sportives (avec médailles d’or, d’argent et de bronze).
Les plateformes se distinguent les unes des autres en fonction des métriques qui sont prises en compte pour réaliser les classements. Ainsi, 360Learning, qui accorde une place importante à la collaboration, va récompenser dans son système les actions des apprenants qu’il valorise dans son discours. Il y a ainsi pour 360Learning un leaderboard en lien avec l’investissement dans des activités collaboratives auprès des autres apprenants (Figures 1 et 2).
Figure 1. Un leaderboard de la plateforme 360Learning, mettant en avant, selon une logique de médailles (or, argent, bronze), les apprenants les plus investis dans une formation.
Figure 2. Les « champions » de la plateforme 360Learning, apprenants s’étant investis dans l’assistance aux autres apprenants selon une logique d’apprentissage collaboratif
Néanmoins, si l’on se place dans une perspective de consommation de contenus (vidéos et quiz) – ce qui est clairement davantage la logique universitaire, un simple leaderboard fondé sur la progression au sein du cours (pourcentage des modules/vidéos/quiz ettectués) est amplement suffisant. Nous illustrons ce cas avec le plugin Level Up de Moodle (Figure 3), plateforme pourtant considérée comme datée du point de vue de l’expérience utilisateur. La mise en place d’une telle fonctionnalité de Leaderboard est peu coûteuse.
Figure 3. Plug-in Level Up de Moodle mettant en scène un « leaderboard », comparant les apprenants selon le progrès effectué
Le surcoût peut être induit par des fonctionnalités supplémentaires, comme la possibilité d’associer gamification avec des fonctionnalités de maintien de l’engagement pensées sur mesure. Ainsi, dans le cas de Beedeez (Figure 4), il est possible de réaliser de véritables campagnes de maintien de l’engagement, ciblant les apprenants les plus désengagés, et utilisant les mécanismes de gamification pour faire revenir les utilisateurs dans des dynamiques d’engagement. Ne devrait-on pas faire de même dans l’enseignement supérieur, plutôt que d’attendre la fin du semestre et de l’année pour faire redoubler un.e étudiant.e ? Je sais qu’un.e enseignant.e isolé.e n’aura sans doute pas le temps pour cela, mais si l’on centralisait ? A voir.
Dernier point que je voulais aborder avec vous : les duels de Coorpacademy, où les apprenants se lancent des défis. J’ai vu cela même à l’école primaire avec des applications de calcul mental. Je suis sûr que cela pourrait faire fureur dans l’enseignement supérieur à condition de pouvoir passer par des quiz. Néanmoins, il faut des outils clé-en-main. Les formes classiques comme celles de Level Up pour Moodle constituent des développements intermédiaires peu coûteux qui peuvent constituer des objectifs facilement atteignables. A vous de voir …
Figure 4. Suivi d’une campagne de relances et de gamification pour maintenir engagés les apprenants au sein de la plateforme Beedeez, focalisée sur l’apprentissage mobile