Afin de s’assurer que son action va dans le sens de l’avenir de l’étudiant, quelle est donc l’expérience apprenante qui serait proposée en école de commerce et qui prendrait exemple des réussites de l’hôpital universitaire tout en l’adaptant à son contexte ?
Le lundi matin, une nouvelle problématique est présentée. Il s’agit d’un cas réel et idéalement conçu et présenté en partenariat avec une entreprise ou une organisation. Dans un premier temps, des cas simples pourraient être axés sur une discipline précise : lancer un produit spécifique d’un fabriquant de produits de beauté (marketing), émettre une recommandation sur une acquisition potentielle qui fait la une de la presse (stratégie ou finance), gérer une ré-organisation d’une entreprise en difficulté (management), faire une cloture comptable d’une PME de la région, etc. A chaque fois, il s’agit de cas réels, et donc pertinents dans la perspective des étudiants. Et si les projets doivent être simples au début, ils pourraient être plus avancés et transverses par la suite. Une fois que les étudiants se seraient fait la main sur la méthode et auraient acquis les bases des différentes disciplines, on pourrait alors s’attaquer à des problématiques plus complexes : la création de nouveaux services, l’optimisation d’une chaine de valeur, une analyse de la stratégie et de la culture d’une entreprise…
Lors de cette première matinée, la situation serait présentée, et les ressources disponibles le seraient aussi : professeurs experts sur le sujet, ressources e-learning pertinentes, ouvrages de références, vidéos ou MOOCs liés au sujet. Dans un monde toujours plus bruyant, il ne suffit pas que la ressource soit accessible, il faut que l’équipe pédagogique puisse donner des clés et hiérarchisent l’information pour ceux qui ne savent pas toujours où chercher.
La fin de cette première journée pourrait ensuite être consacrée à du temps de travail en groupe ou individuel pour se familiariser avec le sujet et revoir les bases ou des concepts plus avancés si nécessaires. L’objectif de cette première séquence serait de poser un premier cadre au problème, et d’identifier les éléments pour développer une approche, et distinguer ce qui est connu des étudiants de ce qui doit encore être acquis.
Le mardi matin, les étudiants ont alors l’occasion de travailler individuellement. Lire des livres, voir des MOOCs, ou même solliciter des experts (de préférence en groupe) afin de mieux comprendre là où ils mettent les pieds. L’après-midi, à nouveau travaux de groupes, cette fois accompagnés par des « coachs » qui guideraient les étudiants.
Le mercredi matin, les étudiants passent alors à un premier exercice de synthèse. Ceci afin de préparer une première version du document qui sera soumis l’après-midi, et une présentation orale si tel serait le cas en pratique (par exemple au management de l’entreprise, à l’audit, etc.) Ce premier livrable pourra alors donner lieu à un premier feedback précis : qu’est-ce qui est bien dans le travail et qu’est-ce qui pourrait être amélioré ? Car pour que ce genre de dispositif fonctionne en pratique, il faut de nombreuses itérations, des feedbacks réguliers et constructifs, afin que les étudiants qui ne savent pas toujours où aller puisse être rapidement ré-orientés dans la bonne direction.
Les étudiants sont jetés à l’eau, mais ils ne sont pas lachés dans la nature ! Le maître-nageur n’est pas loin, et tend une perche si nécessaire…
Après ce premier feedback, une nouvelle série de séquences de travail individuel, travail en groupe, et accompagnement d’experts a lieu jusqu’à la fin de la semaine.
Le vendredi après-midi, les rendus finaux peuvent alors être notés et commentés. A nouveau dans une perspective constructive afin d’aider l’étudiant à faire mieux la prochaine fois. Car dès la semaine suivante, un nouveau projet – sur un autre sujet – sera présenté et analysé. L’idée étant qu’en multipliant les cas et les projets, tous les sujets du management soient couverts à termes. Au fur et à mesure de l’année, le périmètre des questions couvertes s’élargit, et la complexité et la transversalité des problématiques s’étend.
Il ne serait d’ailleurs pas inconcevable qu’une semaine soit de temps en temps dédiée à une approche plus classique (comme pour des cours). Mais ceci serait bien conçu dans la perspective d’un projet qui nécessiterait cette connaissance. A nouveau, c’est le projet – idéallement venant d’une entreprise – qui est la raison d’être de la démarche; et le cours qui n’est qu’un moyen de parvenir à un résultat excellent.
Il est utile de s’interroger sur le modèle économique d’une telle démarche. Mais notons tout de suite que dans une école comme l’ESSEC, un tel dispositif pourrait se concevoir à coûts constants. En effet, en l’état, chaque créneau de trois heures mobilise un professeur et souvent une personne qui coordonne le programme et parfois un moniteur (teaching assistant.) Si on n’augmente pas la durée totale que l’étudiant passe à l’école dans une semaine, et dans la perspective où le professeur (élément le plus « cher » du processus) ne serait sollicité qu’à quelques moments précis de notre « expérience apprenante », et si on conçoit des groupes de taille équivalente à celle d’une classe actuelle (40 étudiants, et donc 10 groupes de 4 par exemple travaillant sur le même projet), il n’y a priori pas de raison de penser qu’une telle démarche aurait un coût plus élevé dans une école comme l’ESSEC par rapport au processus existant… Mais cette question sera étudiée en détail plus tard.
Comme il le sera détaillé dans les prochains posts, plusieurs éléments constitutifs de la dynamique d’une école et de son écosystème changeront en conséquence. Car si la plupart des idées qui ont été présentées jusqu’à présent, en particulier la méthode par projets, ont déjà été mises en oeuvre dans de nombreux établissements depuis plusieurs années, c’est la systématisation de cette démarche qui va tout changer. Le principe de construire autour de l’étudiant une expérience apprenante centrée sur le projet est structurante pour tout le reste de l’écoystème.
Tout d’abord, le rôle du professeur se transforme. Il peut être chef d’orchestre, autorité intellectuelle, ou coach. Si ces différentes fonctions sont déjà une réalité pour beaucoup de mes collègues, il faut cependant trouver une approche systématique pour les aider dans ces tâches et les valoriser à la hauteur de leur contribution.
L’école et ses flux d’informations se transforment aussi. L’école devient plateforme. Dans cette logique d’animer une expérience apprenante en articulant professeurs, coachs, experts, entreprises, etc. elle cherche à animer des communautés et des réseaux de réseaux. En particulier, la conséquence sur les systèmes d’information est de les concevoir dorénavant comme une plateforme, à l’instar des entreprises du digital.
Ensuite, dans une dynamique où l’entreprise est autant partie prenante du processus, les sources de financement de l’école pourraient être revues. Et il convient de se demander si une telle démarche est compatible avec la manière dont les acteurs publics ou privés, en particulier les entreprises et les chambres de commerces, et plus généralement ceux qui évaluent l’école, portent actuellement leur action.
Enfin, le principe de s’inspirer des CHU pour les écoles de commerce aura un impact sur une autre part des activités du professeur, et non des moindres : la recherche. Parce que si la démarche proposée transforme l’enseignement, elle permet aussi à la recherche de devenir systématiquement clinique. Les projets apportés par les entreprises peuvent donner lieu à des expérimentations, la validation de certaines théories, et – avec l’accord de l’entreprise évidemment – à la publication des résultats obtenus.
Je ne vois rien de bien innovant derrière cette proposition qui est déjà conduite depuis de nombreuses années dans le cadre de formations professionnelles (licence pro et master) de l’université. Cela fait longtemps que nous mettons nos étudiants en situations d’apprentissage professionnel en leur confiant une commande venue du monde professionnel et co-construisons avec eux une démarche de conduite de projet appropriée en mobilisant savoirs théoriques, pratiques, expérientiels!
Bonjour Laurence.
Je ne prétends pas que faire des projets avec des entreprises est quelque chose de nouveau. L’apprentissage par le projet est effectivement utilisé dans de nombreuses institutions depuis de nombreuses années. A l’ESSEC par exemple, les chaires travaillent avec leurs étudiants sur des cas fournis par des entreprises depuis des dizaines d’années dans certains cas.
Je vous invite à lire mon blog depuis le début. Ce que je propose, c’est d’inverser la logique « je dois donner une matière, je fais un cours, je m’assure de l’acquisition de la compétence grâce à un projet » (approche « centrée sur la matière à donner ») et passer à une approche « centrée sur l’étudiant » qui se décline en « je cherche à créer une rampe de lancement pour l’étudiant, je lui propose donc des projets qui lui permettront de se mettre le pied à l’étrier, et je lui donne le contenu pertinent pour faire aboutir ces projets ». C’est la rampe de lancement qui précède le cours et pas l’inverse.
J’ai la conviction que ce changement de priorité aura un impact structurant sur l’écosystème académique. Car c’est toute la logique d’organisation qui est transformée. Et cela a des conséquences sur les priorités, l’utilisation des ressources académiques, et la manière dont toute une série d’activités sont mises en oeuvre, comme la recherche par exemple.
D’une manière générale, je pense d’ailleurs que les éléments de ce que je propose pourront se trouver ailleurs, au moins en partie. Mon objectif est surtout de proposer une démarche systématique et cohérente, qui envisage l’écosystème académique dans sa globalité (étudiants, professeurs, administration, partenaires académiques ou publics, entreprises, etc.) et enfin qui se pose la question de l’enseignement dans un monde digital. Mais on ne peut pas s’emparer de la question de la technologie sans se poser la question du projet éducatif auquel il répond.
La médecine avant la reforme Debré créant les CHU conjuguait apprentissage et pédagogie académique sous tendus par un parcours très sélectif distinguant
le cursus de base conçu pour former des praticiens de terrain
aboutissait à l’issue à former
des praticiens de terrain(le fantassin )
l’étudiant étant un stagiaire qui tout au long du parcours
était le matin à l’hôpital suivant la visite enseignement de contact de type socratique complété par conférences assurées par des chefs de cliniques ou le professeur titulaire chef de service ou ses adjoints soit agrégés soit medecins des hôpitaux
l’après midi à la faculté :suivant des cours théoriques assurés par des agrégés l’enseignement théorique de l’anatomie ,de la biologie ,de l’anatomie pathologique se completait de séances de dissection de cadavres et de l’apprentissage en laboratoire encadré par des chefs de clinique
Le cursus clivant du concours
principe élitiste de concours de plus en plus sélectifs (troupes d’élite et la garde impériale) qui aboutissait à l’issue à l’agrégation
L’apprentissage était le domaine réservé de l’hôpital segmenté en services
le coaching assuré par les internes, les chefs de clinique en étant des superviseurs :cet encadrement était sélectionné à partir d’ un long parcours parsemés d’obstacles très sélectifs externat ,internat dont la préparation exigeait un travail personnel travail personnel jugé et corrigé par le coach
le CURSUS SELECTIF sélectif destiné à former une élite de spécialistes ,de consultants et d’enseignants chercheurs ,il était né de la volonté de Napoléon créant le concours de l’internat en 1804 le concours inaugural sélectionna un tiers des candidats
Cette sélection se faisait à partir d’ un long parcours parsemés d’obstacles de difficulté croissante externat ,internat dont la préparation exigeait un travail personnel et la participation à des »ecuries » coachées par des internés
le troisième étage de la fusée propulsait
à l’agrégation de médecine
Les progrès scientifiques de la médecine aboutirent à la spécialisation qui se généralisa en1950 Elle imposa la création à coté de l’internat de certificats d ‘études spécialisés destinés à répondre à la demande l’internat étant trop sélectif ,une voie parallèle fut la création de l’internat régional permettant la spécialisation puis la création à coté de l’internat de certificats d ‘études spécialisés Cet enseignement académique se révéla inadapté à cette évolution qu’aggrava l’afflux de candidats :la réponse fut brutale :la sélection en première année avec un numerus clausus la réussite donnant accès aux professions médicales medecins ;dentistes ,sagefemmes (mixage curieux attestant de la profité attachée à un butoir mais compensation nectaires tous les élus purent acceder à l’externat et à l’internat ;Le problème aujourd’hui de l’enseignement de la médecine est surtout lié à la dégradation du service public hospitalier qui soumis à un management comptable est devenu la variable d’ajustement du budget social de la nation niant que la santé est ‘abord un investissement La décentralisation régionalisée associée aux principes de santé communautaire préconisés par l’OMS permettront seules d’entrer dans l’ère numérique…La bureaucratisation et le corporatisme qu’il entretient lui font obstacle .Le personnel hospitalier est devenu un prestataire de service et le malade un consommateur
Dominique Buresi ancien interne des hôpitaux de Nice (1954-55…1957-1959 ) medecins appelé en Algérie 1956-1957 réanimateur Détachement sanitaire opérationnel 12e DI spécialiste de médecine interne ,d’endocrinologie et maladies métaboliques ,de médecine tropicale Omnipraticienmarseille1959-1961 medecin du travail Centre EDF GDF de Corse 1961-1970 ,Médecin chef de service CHR d’Ajaccio (1962-1970 temps partiel service de gériatrie 1970-1994 temps plein service de médecine interné président de la commission médicale membre du conseil d’administration 1973-1976) en détachement 1985-1986 médecin directeur de l’hôpital de la mission française de coopération au Rwanda , coordonnateur de départemental de la lutte contre le SIDA en Corse du sud 1992-1994 médecin commandant réserviste protection civile région Corse 1986-1994 Missions humanitaires (1988 -1999)Soudan ,Roumanie ,ex -Yougoslavie ,Cambodge, Albanie )retraité 1994 limite d’âge 65 ans
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L’apprentissage combine a la pratique permet la maitrise de la competence et aimerait l’echange d’experience,je suis disponible pour Toujours beaucoup app rendre et aboutir a l’acquisition des nouvelles competences
J!aimerai le faire dans une Ecole inspiree du CHU
Le principe du compagnonnage médical pourrait s’appliquer à bien des disciplines. Il couvre des notions de bienveillance, d’exigence mutuelle, ainsi qu’un principe confucianiste basé sur le respect. Bien que mis à mal de nos jours, le compagnonnage pourrait s’étendre à de nombreuses entreprises. Je me souviens de ce chef d’entreprise qui avait passé 2 jours de suite avec sa réceptionniste et avait repensé la stratégie de son entreprise suite à ce compagnonnage surprenant. Et puis c’est un joli mot au sens étymologique riche.
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