Prenons une image : les écoles d’ingénieurs sont des PME. Nul ne contestera que l’économie a besoin d’acteurs de grande taille (les grands groupes) et de petite taille (les PMI/PME). Les avantages des PME sont connus et reconnus : réactivité, innovation, stratégies de niches. Ces qualités sont le résultat de la proximité des fonctions et de la capacité à se mobiliser sur des objectifs précis. Une PME n’a pas pour ambition de figurer dans le classement Fortune 500, mais plutôt d’être la première sur ses niches. Tel est son « business model » et la manière dont elle produit de la valeur ajoutée. Ce n’est pas autrement qu’une école d’ingénieurs conçoit sa performance et sa visibilité.
La taille est sans nul doute un indicateur ou même un accélérateur de visibilité et d’attractivité. Mais la véritable question est de savoir si la taille est une condition incontournable de visibilité et de reconnaissance dans la compétition internationale. Or, tout chercheur, tout enseignant exposé aux réalités internationales peut faire le constat suivant : la visibilité est principalement une affaire de reconnaissance d’individus, de groupes de recherche, de laboratoires, de réseaux collégiaux, parfois de prestige institutionnel.
Acquérir la visibilité, c’est donc avant tout miser sur des personnes, des équipes, des thématiques, des pédagogies innovantes et les doter des moyens adaptés (pas nécessairement lourds ou coûteux). C’est aussi avoir une stratégie ciblée et les instruments adéquats pour la mettre en œuvre. Les questions de structure sont en tous cas accessoires : pour construire de la visibilité, il faut avoir en tête que la quantité, toujours, n’est que l’un des leviers possibles de la qualité. Ainsi, l’essence de la visibilité : l’excellence, la reconnaissance des pairs, peut être portée par des entités de tailles très variées. Les partenaires internationaux ne s’y trompent pas : ils ont parfaitement compris ce qui faisait la performance de nos écoles. Ils signent avec elles des accords, y envoient leurs étudiants, conçoivent avec elles des programmes de recherche.
Nos écoles sont sans conteste attractives. Pourquoi alors voudrait-on se priver de cette composante de l’attractivité nationale ? C’est pourtant l’erreur que nous pourrions commettre si, en termes de visibilité de l’enseignement supérieur, nous misions à l’excès sur l’effet de taille, les stratégies de remembrement, et voulions à tout prix construire l’émergence de « grands groupes » au détriment du tissu de PME. Il y a la place, en France, pour gagner en compétitivité et en attractivité, en exploitant la chance que nous avons de disposer de deux leviers d’attractivité : des Universités et des Ecoles dont les liens doivent être renforcés au moyen de projets structurants et non pas nécessairement par la réalisation de conglomérats.