Le gouvernement annonçait hier les grandes lignes du projet de loi de finances (le « PLF ») pour 2014. Educpros publie d’ailleurs un article sur ce sujet. Sur son blog, Henri Audier livre également un regard critique sur ce PLF, notamment au regard de l’inflation (que la hausse annoncée ne suffit pas à compenser, tant et si bien qu’on peut craindre dans les faits une diminution compte-tenu des coûts croissants auxquels les établissements sont soumis).
Dans un communiqué, la Ministre de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur, Geneviève Fioraso, se félicitait de la progression globale (+0,5 %) des crédits de la Mission Inter-ministérielle de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur (MIRES).
Même s’ils paraissent complexes, les documents budgétaires de l’Etat valent le détour pour juger de la mécanique à l’oeuvre dans l’élaboration du budget de l’Etat et de ses opérateurs (voir notamment le site « Performance publique »). Un exercice auquel je me suis brièvement prêté : je vais tenter de vous livrer quelques remarques, sans pour autant tomber dans une « litanie » de chiffres, afin de comparer la loi de finances initiales 2013 (accessible ici pour le volet « Recherche et Enseignement Supérieur) et le projet de loi 2014 dévoilé hier (accessible ici). Je laisse au lecteur le soin de vérifier les chiffres que j’avance ci-dessous.
Attention toutefois : comparer une loi de finances initiale n avec un projet de loi de finances n+1 est un exercice qui trouve mécaniquement ses limites. Il n’augure ni de ce que sera le bilan d’exécution de la loi de finances 2013 (notamment en raison des rectifications intervenues depuis), ni de ce que sera la LFI 2014 à l’issue du dialogue budgétaire.

Variation entre la LFI 2013 et le PLF 2014 des crédits budgétaires (AE et CP) pour les programmes 150, 231, 172
Dans chaque cas, j’ai comparé les crédits ouverts en « Autorisation d’Engagement » ainsi que ceux ouverts en « Crédits de paiement » de la loi de finances initiales de 2013 avec ce qui a été annoncé pour 2014 (sous réserve, bien entendu, des ajustements qui viendront dans le cadre du dialogue budgétaire). J’ai retenu les 3 programmes « régaliens » de la MIRES : 150, 231, 172. Bien entendu, il y en a d’autres et il convient de relever que le PLF 2014 en introduit deux nouveaux pour un montant total de 5,34 milliards d’euros.
On constate ainsi que le programme 231 « Vie étudiante », dont sont notamment issus les crédits dédiés aux aides sociales et bourses gérées par les CROUS, augmente de plus de 6% : cette hausse s’explique par la prise en compte de la réforme du système des bourses (voir cet article) annoncée au début de l’été.
En revanche, on constate une baisse significative des crédits accordés au programme 172, qui concerne la recherche (et notamment celle des organismes). De là à dire que cette diminution peut être lue comme contribuant à alimenter le programme « vie étudiante », il n’y a qu’un pas que le lecteur choisira ou non de franchir. Le défaut d’un tel raisonnement est bien entendu qu’il ne porte que sur 3 des programmes de la MIRES, mais il met néanmoins en exergue les mécanismes de transferts de crédits entre programmes.
Bien entendu, une analyse fine devrait donc prendre en compte l’ensemble des programmes inclus dans la MIRES. On objectera notamment que l’ajout de deux nouveaux programmes pour plus de 5 milliards d’euros est un effort, mais il mérite d’être considéré au regard de la situation globale des crédits de la MIRES, de la diminution de certains de ses programmes, des changements de périmètres entre programmes et des mécanismes particuliers à l’oeuvre dans le cadre du Programme Investissements d’Avenir (PIA).
Voici le tableau global des évolutions des crédits entre la LFI 2013 et le PLF 2014, dont j’ai ôté les deux nouveaux programmes pour comparer « à périmètre constant ».

Variation entre la LFI 2013 et le PLF 2014 des crédits budgétaires (AE et CP) sans les deux nouveaux programmes
Si on ôte les deux nouveaux programmes, on constate donc que les moyens MIRES sont globalement en hausse (+0,44%) : six programmes augmentent et quatre voient leurs crédits réduits, pour une hausse globale de plus de 113 millions d’euros.
Dans son communiqué, Geneviève Fioraso annonçait +0,5% (+120 M€) pour les crédits « Recherche et Enseignement Supérieur ». On est donc ici sur des chiffres voisins, les différences s’expliquant sans doute à la fois par des écarts d’arrondis et/ou quelques arguments de technique budgétaire.
On voit donc bien ici que l’exercice consistant à « décortiquer » les documents budgétaires est utile mais pas toujours simple. Plus qu’un regard critique sur la réalité concrète de l’effort de l’Etat pour la Recherche et l’Enseignement Supérieur, ce qu’il me semble important de retenir ici est la complexité intrinsèque de la programmation budgétaire. Une hausse de 0,44% masque bien des effets internes, notamment entre les différents programmes, par jeu de vases communicants …
Je ne me suis pas penché sur la questions des emplois, mais suis preneur du regard d’un lecteur sur ce sujet au travers de la question suivante : si le Ministère annonce la création de 1000 postes pour les universités, les retrouve-t-on dans le PLF et surtout les retrouve-t-on, au delà de la variation du plafond d’emplois, dans les crédits de masse salariale ?
Edit le 27 septembre 2013 : suite à la publication de cet article, j’ai pu avoir un échange fort intéressant avec un membre du Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche, en particulier au sujet de la question finale que je formulais ci-dessus. Pour ce qui est du financement de ces emplois, la parution prochaine des « bleus budgétaires » (le PAP – Projet Annuel de Performance) fournira des éléments de réponses intéressants qu’il conviendra cependant de décrypter en prenant en compte différents effets mécaniques (notamment le passage au RCE qui fait basculer le financement d’une partie des emplois progressivement du Titre 2 vers le Titre 3).
One Response to Budget 2014 : hausse des crédits « Vie étudiante ». Oui, mais …