C’est presque un poncif : « la population étudiante est une population connectée ». Une étude de novembre 2013, réalisée par le CREDOC, vient d’ailleurs d’en apporter une confirmation quantitative, en fournissant quelques repères instructifs quant aux pratiques numériques des jeunes et des étudiants. Intitulé « La diffusion des technologies de l’information et de la communication dans la société française », ce rapport permet d’obtenir, notamment, un cliché instantané de l’équipement et de l’accessibilité numérique des différentes catégories de la population française (une étude qui va donc au delà des seuls jeunes et étudiants).
Voici ci-dessous quelques chiffres intéressants relatifs aux différentes catégories ayant trait aux étudiant, au travers de typologies organisées par :
– âge : nous viserons les 18-24 ans, catégorie qui n’intègre donc pas exclusivement des étudiants
– profession : nous viserons les élèves-étudiants, qui n’intègre pas non plus seulement des étudiants
– diplôme : nous viserons les diplômés du supérieur, catégorie qui intègre des diplômés encore en cours d’études mais aussi des diplômés insérés. Elle permet cependant d’établir un lien macro entre « niveau d’études » et degré d’appropriation des outils numériques
J’ai extrait ces données du rapport du CREDOC, en me focalisant sur ces 3 catégorisations car elles sont complémentaires dans leurs représentations des étudiants et des jeunes diplômés. Un choix bien entendu discutable mais il fallait bien retenir une présentation …
Commentons quelques uns de ces indicateurs :
– possession d’un smartphone : la plupart des communicants qui travaillent avec les étudiants a déjà été confronté à cette interrogation quant au taux d’équipement des étudiants en smartphones, qui peut orienter la réalisation de différentes initiatives : applications pour téléphones, sites mobiles etc. Si ce taux est de l’ordre de 62% pour les élèves et étudiants, il est de 75% pour la tranche des 18-24 ans, ce qui donne une fourchette déjà intéressante quant au taux d’équipement des étudiants. A noter que l’enquête du CREDOC fait par ailleurs état de la spectaculaire progression de ce taux dans le temps : il n’était que de 35% en 2011, et a donc été multiplié par plus de 2 en l’espace de 2 ans. Par ailleurs, le CREDOC estime que 57% des élèves et étudiants et 69% des 18-24 ans utilisent leur téléphone pour télécharger des applications (comme « G-Ny », développée grâce à un pool de « beta testeurs » du Conseil de la Vie Etudiante du Grand Nancy). Des résultats à mettre au regard des taux d’équipement, bien entendu.
– possession d’une tablette : cet équipement « émergent » peut également interroger les outils développés par les communicants, qui découvriront peut être grâce à cette enquête que le taux d’équipement des élèves-étudiants et de la tranche d’âge des 18-24 ans s’établit à 21%, soit seulement 4% de plus que le taux de la population générale. L’enquête du CREDOC montre d’ailleurs que la distribution par classes d’âge de ce taux d’équipement est assez homogène. Cet indicateur me rappelle qu’il y a quelques années, la Faculté de Médecine de Nancy avait pris l’initiative d’acheter un iPad à chacun de ses nouveaux étudiants de 2ème année, à l’issue de leur PACES, et a depuis développé quelques iBooks.
– possession d’un ordinateur portable : 80% des élèves et étudiants, et 84% de la classe des 18-24 ans, en sont équipés. C’est beaucoup plus que la population générale, pour qui ce taux n’est que de 61%. A noter qu’étrangement, le taux relatif aux élèves et étudiants équipés vient de stagner deux années de suite à 80%.
– accès internet à domicile : le taux dépasse ici les 90% pour les étudiants, contre 81% pour le reste de la population. Cela fait cependant près de 10% des étudiants qui ne disposent pas d’Internet chez eux
– utilisation d’un téléphone pour surfer sur Internet : 63% des élèves et étudiants et 78% de la tranche des 18-24 ans déclarent être dans ce cas.
Ces quelques données permettent donc d’avoir une vue assez fine des outils dont disposent les jeunes et les étudiants pour développer leurs pratiques numériques. Toutefois, l’enquête du CREDOC révèle que 14% des élèves et étudiants ne s’estiment pas compétents pour utiliser un ordinateur, ce taux étant le même pour les 18-24 ans (voir page 139 de l’étude). Aussi, si on peut se satisfaire de voir progresser les taux d’équipements, il convient de rappeler que la « fracture numérique » se traduit également au travers des compétences dont disposent les jeunes et les étudiants pour s’approprier et utiliser ces outils.
Ces résultats permettront donc sans doute d’éclairer les orientations politiques et les choix stratégiques des établissements et des acteurs qui « communiquent vers les étudiants », pour répondre à des questions comme :
– faut-il continuer à équiper les campus en ordinateurs en libre accès ? Et si oui, dans quelles proportions ? Ne faut-il pas plutôt se concentrer sur l’objectif d’aider les étudiants qui ne peuvent en disposer à acquérir leur matériel ? Une question non-triviale dont je me souviens d’ailleurs avoir discuté avec des DSI d’établissements à de nombreuses reprises …
– comment peut on lutter contre la « fracture numérique » s’exprimant au travers de la maitrise inégale des outils et concepts numériques par les jeunes ?
– faut-il passer au « tout numérique » en matière de documentation et d’information du public ? Pour une université par exemple, faut-il encore éditer un guide étudiant « papier », ou ne faudrait-il pas plutôt développer l’information en ligne ? Avec quels outils et quelle ergonomie ? Ou maintenir les deux ?
Je ne me risquerai pas à tenter de répondre à ces questions, mon but étant plutôt ici de vous livrer quelques éléments chiffrés qui montrent que si les étudiants constituent bien une population mieux connectée que la moyenne, elle n’est pas pour autant totalement homogène dans sa pratique du numérique…
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