L’année se termine, une nouvelle toute fraiche arrive, la vague des MOOC est passée. Il est temps de se retourner sur deux années qui ont profondément remué la façon d’enseigner et d’apprendre… et ce n’est pas fini !
Répétons le encore : les MOOC ne sont pas une technologie mais des façons d’acquérir des connaissances en utilisant des technologies.
Je n’en veux pour preuve que le dernier numéro de Campus Technology où l’éditeur Rhea Kelly consacre un article au changement qu’introduit Columbia University dans l’enseignement magistral : l’introduction de la pédagogie inversée dans l’amphithéâtre. Les étudiants doivent apprendre les éléments de leur cours à l’avance mais, grand changement, au lieu de livres ou de e-books, ils doivent regarder des vidéos, lire quelques documents, répondre à des quizz semaine après semaine ; le support : la plateforme d’enseignement de l’université. Cela ne vous rappelle rien ?
Pour animer le cours magistral, qui vient ensuite, les enseignants ont introduit un système de vote instantané. Cela ne vous rappelle rien, non plus ? Plusieurs universités en France l’ont déjà fait depuis plusieurs années, à commencer par la mienne où les physiciens ont même étudié de très près l’impact sur l’apprentissage.
La principale difficulté, que les enseignants rencontrèrent, a été de faire travailler, à certains temps, les étudiants en petits groupes : difficile dans un amphithéâtre classique de se regrouper pour échanger avec ses voisins ! Comme quoi la révolution n’est pas simplement numérique mais aussi architecturale comme je l’expliquais dans mon billet du 23 novembre.
Et voici résumé un impact magnifique des MOOC : la classe inversée ne se limite pas à l’enseignement numérique et tout ce processus peut s’imaginer avec fort peu de technologie. Les vidéos pimentent l’apprentissage mais ne sont, après tout, qu’une forme parmi d’autres de transmission des connaissances. Le vote instantané peut même s’envisager avec fort peu de technologie comme l’a expérimenté l’université René-Descartes avec des feuilles imprimées avec quatre carrés de couleur différente et une analyse au moyen d’un simple smartphone.
Tout ce discours pour expliquer que le principal apport du phénomène MOOC dans l’enseignement supérieur (nous aborderons une autre fois leur impact dans les autres champs : éducation primaire et secondaire, formation continue, éducation populaire…) est d’avoir fait bouger les lignes et d’obliger à réfléchir à d’autres façons d’apprendre et d’enseigner. Il est d’ailleurs amusant de s’apercevoir que les principaux opposants aux MOOC et à l’enseignement numérique en France, je pense à certains regroupés derrière un nom prestigieux, ne se sont absolument pas intéressés à cette dimension d’appropriation de nouvelles façons d’apprendre. Ils n’y ont vu que des moyens, pour diminuer les moyens financiers des universités, voire réduire le personnel. Ceci n’a aucun sens quand on connaît le coût de développement d’un MOOC ou d’un SPOC. Aucune université en France, très peu en Europe, n’a les moyens de basculer ses cours car aucune ne peut supporter l’intégralité des coûts de développement. Il est indispensable de se regrouper et de mutualiser ses créations. FUN-MOOC et d’autres acteurs seront incontournables dans ce changement. Ceci est vrai aujourd’hui et le sera encore plus demain avec des outils d’apprentissage adaptatifs intelligents qui créeront dynamiquement des parcours de connaissance individuels. Leur construction sera si sophistiquée qu’il faudra assembler des équipes importantes et les coûts exploseront. La forme d’enseignement la moins chère, pour un pays comme le notre, serait encore de construire de grands amphithéâtres : 1000 ou 2000 étudiants en face d’un professeur. Pas besoin non plus de construire des réseaux informatiques internes ni d’acheter du matériel informatique !
Ceux qui s’opposent au numérique aujourd’hui devraient réfléchir aux phénomènes sociétaux sous-jacents et au fait, contrairement à ce qu’ils prétendent, qu’ils sont les défenseurs d’un ordre ancien. Se scandaliser des dépenses faites pour équiper un amphithéâtre avec des boitiers cliqueurs, comme l’ont fait récemment certains, dans un tract dans mon université, n’est probablement pas la meilleure façon d’envisager l’avenir pour nos étudiants.
Mes meilleurs souhaits aux MOOC pour l’année 2015, non pour ce qu’ils sont, mais pour la dynamique qu’ils introduisent dans la mission passionnante qu’est pour nous l’enseignement.