Monthly Archives: novembre 2015

Sans voix

vendredi1Mon billet apparaît aujourd’hui, dans Educpros, juste posté avant les événements tragiques de vendredi. Il me paraît dérisoire aujourd’hui et il me semble essentiel important de revenir sur l’importance qu’a joué la communication numérique tout au long de cette nuit de cauchemar.

J’étais allé me coucher tranquillement vers minuit, sans rien savoir bien sûr. J’avais regardé les nouvelles à 20h sur une chaîne de télévision et évidemment rien ne pouvait être dit.

Heureusement je lisais un e-book sur ma tablette lorsqu’un message d’une amie américaine de Philadelphie m’est parvenu, au travers de messenger, s’inquiétant pour moi et ma famille. Il était 18h pour elle, l’heure des actualités et la nouvelle faisait la première page. Je suis tombé des nues, j’ai cru un instant à une mauvaise blague mais la radio et la télévision m’ont rapidement fait comprendre le cauchemar que nous vivions.

Les assassins n’avaient pas visé n’importe qui, n’importe quoi. C’est à notre jeunesse qu’ils s’en sont pris dans ces quartiers qui sont les leurs. Comme de nombreuses personnes je me suis inquiété pour mes proches, mes enfants et mes neveux et j’ai immédiatement envoyé une série de sms pour en savoir plus. Mais comment faire vis à vis de toutes mes connaissances et amis qui pouvaient être sortis ce vendredi soir ? Facebook s’est révélé rapidement apporter une partie de la réponse avec son application qui demandait à toutes les personnes enregistrées dans la région parisienne de signaler qu’elles étaient en sécurité. Certes je ne pouvais avoir de réponse pour tout mon carnet d’adresse parisien mais le nombre de personnes dont j’ai eu des nouvelles rassurantes au travers de tous ces moyens est impressionnant. La touche finale est venue avec WhatsApp. Lorsque nous étions partis aux Etats-Unis il y a trois semaines, le petit groupe de français que nous étions, avait utilisé une liste sous WhatsApp pour échanger à tout instant et nous retrouver à la sortie des conférences, dîner ensemble… Elle a fonctionné une nouvelle fois, le lendemain matin, pour nous apprendre qu’une collègue qui se trouvait au Bataclan en était sortie saine et sauve.

Pendant la nuit nous avons suivi les nouvelles à la télévision. Parallèlement je pianotais sur ma tablette, basculant de Tweeter à Facebook pour en savoir plus. Bien sûr, même s’il faut lire ces communications avec précaution et les vérifier, comment ne pas être ému par les appels proposant l’hospitalité à ceux qui fuyaient devant la terreur, au don du sang et bien d‘autres encore. Comment ne pas être réconforté en voyant, sur la vidéo d’une sortie secondaire du bataclan, une personne allongée qui possédait encore assez de moyens pour appeler au secours au moyen de son smartphone. L’ensemble des messages de réconfort, de propositions d’aide de toute sorte ont été la première manifestation d’un grand mouvement de solidarité qui fait chaud au cœur.

Tout le week-end sont tombés les courriels, de mes collègues et amis français et étrangers du monde entier, d’Europe, des Etats-Unis, du japon, qui s’inquiétaient de moi et de mon entourage et me priaient de transmettre à tous leurs condoléances et leur sollicitude. Les pages Web des journaux du monde entier, les photos postées sur Instagram et ailleurs montraient que nous n’étions pas seuls dans notre drame.

Au travers de ce rapide billet je voulais montrer que le Web et le numérique ont joué un grand rôle positif au cours de ses événements. Je voudrais insister sur le fait qu’ils font partie de notre quotidien et adresser un message à tous les responsables de nos universités, et pas seulement à ceux en charge de la communication, sur le fait qu’il faut les utiliser au quotidien. Le numérique a commencé à pénétrer l’Enseignement Supérieur. Une leçon apprise au travers de ces tragiques événements, est qu’il peut faire beaucoup plus encore : il peut servir à créer de véritables communautés, ce qui nous manque le plus aujourd’hui.

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Et les MOOC, alors !

051111_darwin_portrait_02Un silence un peu long de ma part. Je n’ai pas respectée la règle d’or des blogs qui est de publier à intervalle régulier. L’explication est simple : je reviens de quinze jours aux Etats-Unis, d’abord le congrès annuel d’Educause à Indianapolis, la plus grande manifestation du monde consacrée aux technologies de l’information dans l’Enseignement Supérieur (7000 participants !), la plus grande foire aussi dans ce domaine avec plus de 200 fournisseurs. Un voyage qui fût aussi l’opportunité de visiter Purdue University dans l’Indiana et Washington University à Seattle ainsi que le campus Microsoft à Redmond. En bref de quoi alimenter ma réflexion pour plusieurs blogs.

Et les MOOC alors ?

Lorsqu’on filtre le programme d’Educause par mot clé en employant le terme MOOC on retourne deux articles et un stand de l’université de San Jose dans la foire pour proposer des enseignements à distance. Il y a deux ans cette recherche retournait plus de 120 présentations ! Les MOOC seraient donc morts ? Disparus ? Pas si sûr !

D’abord parce que des institutions, parmi les plus dynamiques, (AZU, voir l’article d’Educpros du 12 novembre et mon blog du 18 octobre), le MIT ou Champaign University les utilisent pour diminuer le coût d’inscription à certains de leurs cursus mais aussi parce qu’ils sont très présents, cachés sous d’autres noms comme cours en ligne. Interrogé sur ce sujet G. McCartney, VP Information Technology et CIO à Purdue, précise gentiment que, non les MOOC, ne sont pas au sommet de leurs préoccupations car ils ne se soucient pas de rechercher de nouveaux étudiants et que, contrairement à d’autres institutions, ils ne cherchent pas à gagner de l’argent par ce moyen. Mais il précise néanmoins qu’ils en construisent … quatre par an et en ont déjà une dizaine ! Purdue est loin d’être la seule à tenir ce discours.

Pour compliquer la lecture de la situation, certains, rencontrés à Educause, ajoutent, ironiques, que construire un MOOC demande du travail et que les plus volontaires sont ceux qui ont un livre à vendre. Traduisez : certains enseignants possèdent déjà les documents nécessaires à la construction de leur cours, en s’appuyant sur leurs écrits, et un MOOC est un excellent vecteur publicitaire pour promouvoir sa vente. Cela, je l’avais déjà entendu, lors d’une conférence à l’UPMC, donnée par un célèbre informaticien américain qui venait nous présenter le phénomène MOOC, il y a plus de deux ans !

Aggravons encore le cas des MOOC : autre discours entendu, les certifications ajouteraient peu à l’employabilité. Ils seraient bons pour la formation continue tout au long de la vie (mon interlocuteur pensait aux nanodegrés de Udacity) mais guère intéressants dans le cadre de l’enseignement initial. Les employeurs auraient peu répondu aux espoirs que l’on mettait dans l’amélioration de l’employabilité.

Alors, les MOOC ?

Il ne faut pas s’y tromper. Les MOOC sont présents, bien vivants et font maintenant partie du paysage ordinaire des universités. Les initiatives que j’ai précédemment mentionnées, montrent même que certains y voient une manière de résoudre l’immense problème de la dette financière des étudiants sans remettre en cause le business model américain de l’Enseignement Supérieur. Mieux encore, les deux grands fournisseurs nationaux, Coursera et EdX, sont souvent vus comme des banques de cours qui pourraient remplacer les manuels que les étudiants doivent acheter chaque année. D’ailleurs les éditeurs de ces manuels lancent leurs propres MOOC.

La notion de MOOC se confond avec celle de cours en ligne. Leur usage en enseignement mixte (blended learning) se banalise et des champions comme l’université de Floride Centrale (UCF) ne l’évoque même plus tant il se banalise. De fait les MOOC ont atteint une partie de leur objectif. Ils ont permis de découvrir que les plateformes d’enseignement pouvaient être employées bien au-delà de leur usage habituel, communication et stockage de documents, pour construire des parcours pédagogiques et donner, ou devrais-je dire, obliger les étudiants à avoir un rôle actif. Tous mes interlocuteurs insistent sur le fait que les MOOC ont obligé à concevoir des documents de meilleure qualité et ont donné à la vidéo ses lettres de noblesse pour la pédagogie. Ceci est tellement vrai que, dans les deux universités que nous avons visitées, il existe un studio vidéo d’auto-enregistrement à la disposition des étudiants pour leur permettre de présenter leurs travaux sous cette forme.

Les MOOC ont impacté les universités. Le nombre d’étudiants inscrits sur les campus a atteint un plateau depuis quelques années, le nombre de ceux inscrits en ligne s’est accru de 570 000 l’année dernière pour un total de 6,7 millions ! Même lorsqu’on en produit activement les MOOC ne sont plus l’objet du discours. Ils sont un fait.

Et le coté massif, ouvert à tous ?

On n’entend plus ce discours. Le mythe du petit gars habitant les slums de Phoenix et s ‘élevant dans la société grâce à des MOOC, évoqué par Daphne Koller, à l’époque où elle fréquentait Educause et attirait des milliers d’auditeurs à ses conférences, a disparu. Il reviendra peut-être le jour que je pense proche où Coursera pourra proposer des parcours de bachelor pour un coût moins élevé que les collèges, encore que cette idée soit mise en danger par les projets des démocrates de rendre ce niveau d’étude gratuit pour les plus modestes. En attendant il continue à intéresser de nombreuses universités américaines qui ont des vues vers l’Asie et dans une moindre mesure l’Afrique. L’Inde, la Chine, en particulier, sont des continents qui intéressent les universités à la recherche de nouveaux clients.

Non, les MOOC sont bien vivants et, Darwin oblige, ils se transforment et s’adaptent !

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