La loi de transformation de la fonction publique va être très rapidement être adoptée en procédure accélérée. Il faut s’en féliciter, car elle représente de formidables opportunités pour les universités… et surtout leurs présidents, qui vont enfin pouvoir devenir pleinement de « vrais managers, de vrais chefs d’entreprise » !
Le titre II du projet de loi vise à développer les leviers managériaux pour une action publique plus efficace.
Il permet aux responsables publics d’exercer pleinement leurs missions d’encadrement. Il prévoit ainsi de nouveaux leviers permettant de répondre aux évolutions et transformations du service public en facilitant le recrutement des compétences nécessaires, en valorisant l’engagement professionnel des équipes et en accordant plus d’autonomie dans la procédure disciplinaire.
Des leviers agiles pour restructurer les collaborateurs
Bien sûr, il viendra tout de suite à l’idée ces (nombreux) collègues qui (il faut bien l’avouer) ne font pas correctement leur travail en usant de leur garantie de l’emploi, voire même à ces enseignants-chercheurs qui parfois usent de leur liberté et de leur indépendance pour n’en faire qu’à leur tête. Cette loi va (enfin) permettre de les pousser vers la sortie.
L’article 27 crée un « dispositif global d’accompagnement des agents dont l’emploi est supprimé dans le cadre de la restructuration d’un service ou d’un corps« . Néanmoins, il s’agit là d’un levier à large assiette (une masse d’arme), qui ne sera utile que pour organiser des plans de sauvegarde massif de l’emploi.
On lui préférera l’article 28, qui « entend doter l’administration d’un dispositif d’accompagnement des changements de périmètre des services publics qui s’opèrent notamment en confiant à une personne morale de droit privé tout ou partie des activités qui était assurée directement par l’administration« . Le service scolarité coûte cher dans votre établissement ? Pourquoi ne pas la confier à une personne morale de droit privé, qui s’en chargera bien mieux que votre administration ? Il faut espérer que cette disposition puisse être appliquée aux composantes, qui seraient ainsi enfin mise face à leurs responsabilités dans l’exercice (souvent dispendieux) de l’enseignement.
Mais la disposition la plus utile sera sans doute la rupture conventionnelle, instaurée par l’article 26. C’est un véritable scalpel permettant de retirer les cellules malignes du corps administratif. Combinée avec l’article 13, qui souligne l’importance « du critère de l’engagement professionnel et du mérite » dans « la détermination de la rémunération de tous les agents publics« , avec l’article 15, qui précise « les modalités d’abaissement d’échelon et de rétrogradation« , et avec l’article 3, qui supprime les CHSCT, mais aussi des disposition comme la suppression des 192h, il ne sera pas bien difficile de rendre la porte plus attirante que la chaise pour les collaborateurs indésirables.
Mais ces bâtons ne seraient rien sans une carotte.
Vers un financement moderne de la recherche
On ne compte déjà plus les collaborateurs dont les recherches ne sont plus financées. Ce sont généralement les recherches auxquelles on ne comprend rien et dont la valorisation est loin d’être évidente. L’efficacité du financement par appel à projet n’est donc plus à prouver, mais ce projet de loi présente une formidable opportunité pour réellement organiser la compétition entre les chercheurs. En effet, sans compétition pas de gagnants, et tout le monde aime les gagnants (alors que les perdants, pas trop, pour ceux-là, voir les levier agiles présentés précédemment).
Actuellement, les financements ont des durées longues, parfois jusqu’à 5 (cinq) ans ! Même si c’est généralement beaucoup moins, de telles durées sont incompatibles avec le monde moderne ! De plus, avec la concentration disciplinaire des financements, de très nombreux chercheurs travaillent exactement sur le même sujet. Lorsque plusieurs équipes sont ainsi en compétition, quelques mois suffisent à savoir qui va gagner. Le end-game s’éternise donc et représente un gâchis d’argent public.
L’article 8 « crée un nouveau type de contrat à durée déterminée au sein de la fonction publique, le contrat de projet« . Ce contrat de projet est formidable, car il prend fin « lorsque le projet ou l’opération se termine de manière anticipée ». La perspective d’une véritable agilité dans le financement de la recherche ?
Appels Nationaux à Projets Excellents (ANPE).
Dans les ANPE, une dizaine d’équipes sont mises en compétition sur un seul et unique sujet. Tous les six mois, une revue d’avancement permet de trier les projets par ordre de valorisation. La moitié des projets la moins bien évaluée est immédiatement arrêté, et les contrats de projet se concluent quasi-automatiquement.
On évite ainsi d’inutiles dépenses, dans une saine compétition entre les chercheurs, qui permet l’émergence naturelle des seuls Excellents !
Bien malheureusement, les syndicats (qui décidément ne comprennent rien à la modernité) ont obtenu que le contrat de projet ait une durée minimale d’un an. Il faudra donc attendre un temps encore bien trop long avant de trier les Excellents des autres, là où quelques semaines suffisent parfois (on ne va pas se le cacher, bien souvent on connait les Excellents avant même la rédaction de l’appel à projet).
Le chemin vers l’agilité est long et semé de disruptions, mais rien ne semble pouvoir ralentir la modernisation des Universités.
Bon premier avril à tout le monde. Ou pas.
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