« Le jeudi 21 avril 2021, l’Université de Lille, l’Ecole Nationale des Arts et Industries Textiles, l’Ecole Nationale Supérieure des Arts et Industries Textiles, l’Ecole Supérieure de Journalisme de Lille et Sciences Po Lille se sont prononcées favorablement sur les statuts donnant naissance à l’établissement public expérimental. »
Ce vote des statuts constitue une phase d’un processus qui méritera d’être observé attentivement. D’autres suivront, notamment dans la gestion des relation entre Ecoles et Université, celle de la subsidiarité, comme des participations aux décisions. En attendant, au moment où la crise amenée par la pandémie, renforce la pression de l’immédiat, une plongée dans le passé de l’université publique de Lille offre une mise en perspective utile à l’intelligence de la marche du temps.
Ce temps est fidèlement évoqué dans un texte composé par Bernard Pourprix, à partir d’extraits d’entretiens réalisés par le Groupe Mémoire Orale de l’ASAP (Association de Solidarité des Anciens Personnels de l’Université de Lille), largement consacré à « la mémoire de la faculté des sciences et de l’université de Lille 1, 1960 – 1980 » et mis en ligne le mardi 30 avril 2019.
Ce document évoque ainsi un temps où se faisait sentir « le poids de la hiérarchie et les relations mandarinales » tandis qu’émergeaient « les balbutiements de la recherche » puis que commença une « reconnaissance nationale de laboratoires de recherche ». Ce temps connut « les répliques du séisme de mai 68 » et « la séparation entre Lille 1, Lille 2 et Lille 3 » mais aussi (déjà!) « une administration regroupée, structurée, en évolution », « des expériences pédagogiques », « une internationalisation de la recherche » (les expressions entre guillemets reprennent certains des intertitres du document).
On le trouvera, in extenso,à cette adresse : https://asap.univ-lille.fr/spip.php?article60
J’en donne ci-dessous le Préambule :
« Ce texte veut donner un aperçu de la soixantaine d’entretiens que le Groupe Mémoire Orale (GMO) de l’ASAP a réalisés avec des anciens de l’université. Les transformations impliquées par le passage de l’ancienne faculté des sciences à la nouvelle université (1960-1980) constituent le thème dominant des entretiens. Des changements plus récents ne sont pas pour autant négligés.
Sans chercher à faire une synthèse du contenu des entretiens, on peut quand même essayer de dégager quelques lignes de force. L’ancien monde est dépeint en détail. L’enseignement reçu sur les bancs de la faculté est principalement de type magistral. Le manque d’encadrement est manifeste, comme l’absence d’aide aux étudiants en difficulté. Dans plusieurs secteurs, la recherche est balbutiante. Là où elle existe, elle est menée dans des conditions difficiles, avec peu de moyens. Néanmoins, des pionniers ouvrent des voies d’avenir. Certains professeurs laissent les thésards se débrouiller seuls.
Pour les recrutements d’assistants, il n’y a pas de procédure officielle. Au niveau de la faculté, il n’y a pas non plus de structure institutionnelle véritable. Ceux qui n’ont pas le rang de professeurs ne sont pas impliqués dans le fonctionnement du système. De nombreux entretiens éclairent les relations de type mandarinal existant à cette époque.
Mais l’augmentation importante des effectifs entraîne la mise en place d’une gestion collective et une évolution des relations humaines. A Lille, on n’attend pas la loi d’orientation de novembre 1968 pour créer de nouvelles structures, par exemple les départements, officialisés en 1967, mais en gestation dès le début des années 1960. Quand arrive mai 1968, la faculté des sciences, déplacée depuis peu sur le campus, ne tarde pas à élaborer ses statuts. Dans ces périodes troublées, notre université est le lieu de vives tensions. Selon que l’on était, à l’époque, professeur ou assistant ou AITOS, on peut avoir aujourd’hui des opinions bien différentes sur la genèse de la nouvelle université.
Jusqu’au début des années 1970, la recherche est encore considérée, dans certains secteurs, comme une activité nécessaire, sans plus. Ensuite, les idées évoluent, plus ou moins vite selon les disciplines. La recherche se structure, en lien avec le CNRS. Plusieurs interviewés présentent avec passion la genèse et le développement de leur laboratoire. Ils fournissent un éclairage intéressant sur leur contribution personnelle, sur leurs collaborateurs, sur les difficultés des relations humaines, sur l’importance des relations avec des personnalités de premier plan pour l’avancement d’un dossier, etc. Aujourd’hui, le développement des collaborations avec les entreprises va de soi, il n’en était pas de même vers 1970. Les entretiens permettent de mieux comprendre les étapes de l’ouverture de l’université sur le monde socio-économique.
Le travail du GMO n’est pas terminé. Actuellement il réalise des entretiens sur des sujets ou des domaines insuffisamment explorés, et notamment la structuration de l’administration de l’USTL, les innovations pédagogiques, la structuration de la recherche. Le lecteur ne doit donc pas s’étonner s’il trouve que ce texte est incomplet. D’autant que, lors de sa composition, il a fallu faire des choix : il n’était pas envisageable de présenter la totalité des questions abordées lors des entretiens !
Censé reproduire la réalité des entretiens, le texte que vous allez lire est constitué essentiellement d’extraits. On pourra objecter que ce travail ne dépasse guère le stade du recueil des données mémorielles et que l’exploitation de ces matériaux bruts reste à faire. Oui, certes ! Mais il faut un début à toute chose… »