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Michel Abherve

Keynes, Marx et Bourdieu hors du lycée !

Les “Trentenaires de l’UMP”, et leur responsable Franck Allisio, tentent de faire parler d’eux. Dans un communiqué, ils interrogent “Et si Vincent Peillon s’intéressait à la « neutralité » des manuels et de l’enseignement de l’économie ?” avec cette phrase
“Si Vincent Peillon s’offusque du fait que l’enseignement catholique diffuse des valeurs catholiques, il devrait être d’autant […]

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Jean-Luc Vayssière

Les étudiants n’iront pas à pied de Saclay à Versailles ou Saint-Quentin

L’attractivité de la future Université Paris Saclay est conditionnée par la perspective d’excellentes conditions d’études et de meilleures liaisons en transport en commun entre ses différents campus, vers Paris et Orly.

La confirmation par le Premier Ministre, lors du 7e Forum de la recherche et de l’innovation fin octobre, des contours géographiques du cluster Paris Saclay, au-delà du Plateau de Saclay, et incluant Versailles et Saint-Quentin est une avancée majeure.

Mais la construction de la ligne de transport en commun Orly-Versailles demeure une condition sine qua non pour que les campus de l’UVSQ soient partie prenante du futur cluster mondial. Les investissements immobiliers consentis par l’Etat sur le plateau du Moulon à Saclay ne doivent pas faire oublier la nécessité de relier les campus de Versailles, de Saint-Quentin-en-Yvelines, et de Vélizy sur lesquels l’UVSQ est implantée.

C’est pourquoi, le 27 novembre dernier, le conseil d’administration de l’UVSQ s’est prononcé à l’unanimité en faveur du soutien à la motion votée quelques jours auparavant par le Conseil général des Yvelines sur la ligne verte du Grand Paris Express et sur le projet Eole.

La nécessité d’améliorer le réseau de transports rassemble tous les acteurs du territoire. Yves Vandwalle, vice-président du Conseil général des Yvelines, a présenté la motion aux administrateurs en indiquant que « le transport entre Saint-Quentin-en-Yvelines, Versailles et Saclay est essentiel ». Il a affirmé : « l’UVSQ est une très belle réussite et le partenariat privilégié avec Paris Saclay est (aussi) le choix du Conseil général. »
Président de l’Etablissement Public Paris Saclay, Pierre Veltz a renchéri « j’ai toujours pensé que c’était important que l’UVSQ fasse partie du projet  Paris Saclay. La liaison de transport rapide est essentiel ». Enfin, le représentant du président de la Communauté d’agglomération de Saint-Quentin-en-Yvelines, Jean-Pascal Dumas, a confirmé en séance que « la Casqy soutient le projet de transport présenté par le Conseil général et confirme son intérêt pour Paris Saclay. »

Une belle unanimité donc, même si le doute plane sur la réalisation effective du Grand Paris, son financement n’étant pas assuré. Car comme l’a rappelé le Premier Ministre, le budget prévisionnel 2013-2015 ne prévoit pas le milliard d’euros nécessaire au lancement de la construction du futur métro automatique.

« La réalisation de la ligne de métro automatique du Grand Paris Express est nécessaire, et elle devrait donc être réalisée pour apporter une réponse efficace, globale à la saturation du réseau actuel et pour le développement de toute la région. Mais je veux vous le dire franchement, l’exercice d’actualisation des coûts et de priorisation des travaux du futur métro automatique, a été engagé par Cécile Duflot à ma demande, mais c’est indispensable. Je veux savoir exactement quel est le coût, pour l’instant nous ne l’avons pas précisément. Des chiffres qui ont été annoncés, ils sont sous-estimés ; par ailleurs, il faudra décider dans quel ordre nous faisons, mais nous ferons. (…) Nous disposerons de tous les éléments en début de l’année prochaine. Et sur ces bases, dès que cela sera nécessaire, et en 2015, et dès 2015 s’il le faut, nous mettrons en place la dotation du milliard au capital de la société du Grand Paris. La liaison jusqu’à Saclay trouvera naturellement sa place dans ce cadre. Car le développement urbain, universitaire et économique de Paris-Saclay ne peut se concevoir sans qu’un moyen de transport adapté ne desserve le plateau et l’accompagne dans sa montée en puissance. »

Discours prononcé par le Premier Ministre au 7e Forum de la recherche et de l’innovation (30/10/12)

En savoir plus sur le Grand Paris Express

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Claude Lelièvre

Un décret pour ”graver dans le marbre” les missions des CPE?

C’est le sens, semble-t-il, de la proposition que vient de faire Daniel Robin (co-secrétaire général du SNES-FSU) dans un colloque à l’initiative de son syndicat  sur le métier de conseiller principal d’éducation «  à la croisée du pédagogique et de l’éducatif ».

Après avoir affirmé que « les missions du CPE, contrairement à celles des enseignants, ne sont pas définies par un texte réglementaire mais par une simple circulaire datant de 30 ans », le co-secrétaire général du SNES-FSU a indiqué que son syndicat réclamait « un décret pour stabiliser ces missions dans le respect du texte de 1982 ».

Le métier de CPE (une particularité française) est généralement méconnu bien qu’important, car en évolution continue et à la jonction (problématique) entre différents ‘’mondes’’ qui ont bien du mal à entrer en synergie : la direction de chaque établissement secondaire, les enseignants, les élèves, les parents. Le CPE est en principe l’interlocuteur de tout le monde et de chacun.

Au printemps dernier (cf mon billet du 29 avril 2012), le syndicat SGEN-CFDT s’était ému du fait que, sur le site internet du ministère, il était indiqué que les conseillers principaux d’éducation sont « membres de l’équipe de direction ». « Nous vous rappelons [était-il-il dit dans la lettre adressée au directeur général de la DGESCO par le SGEN-CFDT] que le corps des conseillers principaux d’éducation est régi par les décrets 70-738 du 12 août 1970, 89-730 du 11 octobre 1989 et 2002-1134 du 5 septembre 2002, et par la circulaire 82-182 du 28 octobre 1982. Aucun de ces textes, ni de façon directe, ni de façon indirecte, ne définit les conseillers principaux d’éducation comme membres de l’équipe de direction, ni même ne les y rattache ».

On peut  à ce sujet,  noter d’ailleurs qu’il est généralement admis que la circulaire  du 28 octobre 1982 (dans le cadre de l’alternance politique de 1981 et d’un front syndical actif sur cette question) a permis les clarifications jugées nécessaires en redéfinissant clairement les spécificités du métier et en situant du même coup tout aussi clairement les CPE hors des équipes de direction. La fin de la lettre adressée au ministère par le SGEN-CFDT sonnait donc déjà  comme une mise en garde : «Nous espérons qu’il s’agit d’une erreur et non d’une volonté de redéfinir unilatéralement et de façon masquée les missions des conseillers principaux ». Et le SGEN-CFDT demandait qu’ « une correction immédiate soit apportée sur le site internet du MEN afin qu’aucun quiproquo ne soit possible dans les établissements sur les missions attendues de ces personnels ».
On attendait la suite. Et on l’attend toujours semble-t-il.

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Jean-François Fiorina

Le Tour du monde en 80 clics…

GEM Digital day - 29 novembre 2012

GEM Digital day – 29 novembre 2012

Le numérique modifie en profondeur notre environnement. Ne pas en prendre la pleine mesure en tant que directeur d’école serait une faute grave. Ces bouleversements touchent la pédagogie, la vie scolaire, la vie professionnelle et privée… Tout se dit, partout, tout le temps comme ce tweet d’un élève (pas de chez nous !) qui déclare : « nous ne sommes que 3 sur 50 en cours aujourd’hui avec la photo d’un professeur esseulé… ». Créer une journée spéciale numérique qui embrasse la totalité de cette révolution pour sensibiliser nos étudiants, c’est l’ambition du premier GEM Digital Day qui se déroule demain dans nos locaux.

Accepter la vague. Notre responsabilité est d’accepter, d’accueillir cette vague numérique. Une révolution « petite poucette » comme le dit si bien le philosophe Michel Serres A cette génération qui parle avec ses pouces sur les écrans tactiles des smartphones et autres tablettes, le pédagogue a pour mission de lui apprendre à optimiser ces outils, et pourquoi pas, à refaire le chemin inverse de la séparation de la vie publique et privée, de la distance critique…

Je vois plusieurs niveaux d’intervention pour une école engagée dans cette mutation.

Le niveau personnel

Paradoxalement les étudiants ont des connaissances et de niveaux hétérogènes quant aux outils numériques. Par goût, par leur formation, ils deviennent hyper spécialistes de Twitter ou de Facebook. Certains gardent leur distance. Pourquoi ?

o Leur formation initiale, les a plus ou moins baigné dans la sphère numérique. Pour les élèves de classes prépas, c’est moins leur tasse de thé, par exemple,

o Leur expérience personnelle dans le domaine, en fait des acteurs confirmés ou des spectateurs quelque fois un peu velléitaires.

Notre mission est donc de leur donner une base commune de connaissances.

Le niveau professionnel

Ce deuxième niveau de connaissances que je dois leur transmettre, concerne le passage des usages aux techniques de management : comment réfléchir ces outils ? Leurs impacts dans la sphère pro ? C’est un vaste chantier, de la connaissance à l’e-réputation. Vous n’imaginez pas le nombre d’étudiants qui reviennent en pleurs d’entreprises avec cette photo d’une soirée bien arrosée sur Facebook qui a déclenché l’ire d’un recruteur. Nous devons également former ces jeunes à l’usage de ces outils dans l’entreprise. Et accepter le fait que l’étudiant peut, aussi, en savoir plus que le prof ou que son hiérarchique ! Ce sont des éléments dont il faut tenir compte.

Le numérique comme secteur d’activité

Je le vis comme une vraie opportunité. De nouveaux métiers émergent dans le web marketing, les contenus, la publicité, les softs, les serveurs… Tout comme ces nouveaux facteurs de croissance que sont la création de son propre emploi ou d’une entreprise. Nous fournissons, là aussi, à nos étudiants les outils pour développer leurs idées et leurs talents. Notre réflexion est permanente. La multiplication des outils et des cibles engendre de nouvelles pratiques quelque fois éphémères. Il est d’autant plus difficile de s’y adapter que demain ces nouveaux usages ne seront peut-être plus pertinents… Apprendre l’agilité est au cœur de la stratégie d’une école de management pour toutes ses populations, étudiantes ou non.

Un mode de vie et de gestion

La communication que j’ai abordée dans mon dernier post peut s’apparenter à une fuite en avant : en plus de nos cibles traditionnelles, de nouvelles communautés émergent, de nouveaux canaux de diffusion également… Je l’assume : nous devons maintenir une image forte sur ces territoires numériques. C’est un travail chronophage car nous ne savons pas clairement quelle est la part d’influence de chacun dans le processus de communication globale d’une école. Nous pouvons nous rassurer en affirmant que, sans cette communication numérique, nous serions relégués aux confins de la galaxie éducative…

Nous pouvons répondre à ces enjeux par la cohésion et une organisation efficace et réactive. Nos étudiants en tout cas passe par plusieurs filtres qui leur donneront un viatique numérique pour faire le Tour du monde en 80 clics ! Il s’agit chez nous :

du certificat 2.0 (identité numérique),

du master internet stratégie/web management,

de nos incubateurs d’entreprises,

de notre Chaire Information et Convergences numériques (avec Sciences Po Grenoble et Supcréa),

de notre premier GEM Digital Day, c’est demain !

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Philippe Jamet

Monde économique, lycées et grandes écoles : les grands absents des Assises

Durant cette première journée des Assises Nationales de l’Enseignement Supérieur et de la recherche, il aura beaucoup été question de “rééquilibrages” : entre financements compétitifs et subventions récurrentes, entre évaluation et autonomie, entre national et régional…

Il est cependant encore un domaine qui résiste, encore et toujours, à cette volonté de retour à l’équilibre : celui de la représentativité des acteurs concernés par l’organisation de l’espace national d’enseignement supérieur et de la recherche.

Un examen attentif de la liste des participants à ces assises, 673 inscrits, laisse quelque peu rêveur (cf. graphique ci-dessous)

Répartition par catégories des participants aux Assises de l'ESR, 26/11/2012

Répartition par catégories des participants aux Assises de l'ESR, 26/11/2012

Compte tenu des sujets débattus aux Assises, notamment la réussite étudiante et la gouvernance de l’enseignement supérieur, la forte représentation du monde universitaire stricto sensu (25%) est tout à fait justifiée. En revanche, la sous-représentation des lycées, des grandes écoles et des acteurs du monde économique toutes catégories confondues (industries, chambres syndicales, pôles, centres techniques…) et des institutions de statut privé est proprement stupéfiante.

Rappelons quelques chiffres. Parmi les 2 350 000 étudiants inscrits dans le supérieur :

  • 60 % le sont dans les universités
  • 15 % dans des écoles (ingénieur, commerce, arts, architecture, etc.)
  • 15 % dans des lycées (STS et classes préparatoires)
  • près de 20 % relèvent d’institutions privées

Il n’est pas non plus inutile de rappeler que, selon la Conférence des Grandes Écoles, ces dernières représentent plus de 40% des diplômes de master et près de 30% des diplômes de doctorat dans leur spécialité. Le poids réel de ces acteurs de l’enseignement supérieur, poids quantitatif comme qualitatif, n’est assurément pas pris en compte dans l’équilibre des délégations participant aux Assises.

Il en va de même du monde économique, pourtant largement sollicité pour le financement de la recherche, le soutien aux universités et les politiques d’innovation. Les industriels et leurs organisations n’en continuent pas moins de susciter une certaine réserve de la part du monde universitaire, que ce soit en termes de participation directe à la gouvernance des universités (notamment l’élection de leurs présidents) ou d’influence dans la stratégie nationale de recherche.

Enfin, hormis sa composante syndicale, la société civile, au travers des associations, des mutuelles, des groupes d’intérêts, des conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux, n’a guère disposé que d’un strapontin dans le grand amphithéâtre du Collège de France. Pourtant, elle aurait probablement des suggestions de bon sens à faire et la légitimité pour les porter, elle qui supporte pour une bonne part, au travers de l’impôt, le financement de notre système universitaire. Une plus large présence des parties prenantes sociales, nous a-t-on dit, “aurait été souhaitable, mais il fallait faire vite”…

La sous-représentation d’acteurs aussi déterminants est à mettre en regard, de mon point de vue, de la sur-représentation de la puissance publique (administrations et ministères). Puisqu’il s’agissait, au travers des Assises, d’imaginer des propositions innovantes dans l’organisation du système d’enseignement supérieur et de recherche, peut-être aurait-il été préférable que notre administration se place en position d’écoute et se fasse plus discrète. Il y aurait, là encore, un chantier de “rééquilibrage” à ouvrir, mais c’est une autre histoire…

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Michel Abherve

L’amélioration de l’alternance se poursuit en octobre

Les chiffres du nombre de contrats en alternance signés durant le mois d’octobre confirment la tendance à une légère hausse qui s’esquisse depuis l’été, et que nous avons déjà signalée (voir Les primes de l’Etat se sont arrêtées et l’apprentissage est en hausse depuis trois mois)
66 173 contrats d’apprentissage ont été signés ce mois, soit 6,46 % de […]

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Bernard Desclaux

Le CAS et le Service public d’orientation tout au long de la vie

Le centre d’analyses stratégiques vient de publier un rapport intitulé « Le service public de l’orientation tout au long de la vie » (Note d’analyse 302 – Novembre 2012). Le fichier pdf peut être récupéré sur le site en bas de la page.
Que peut-on en dire au moment où la question de la régionalisation de cette politique est à nouveau soulevée ?

L’usager au centre

Cette note s’ouvre sur une définition de l’orientation qui est à rapprocher de la définition européenne formulée lors de la Conférence PETRA, Rome, novembre 1994 :
« S’articulant autour d’un service dématérialisé (un portail internet et une plateforme téléphonique) et s’appuyant sur les organismes dédiés à l’orientation, le SPO s’attache dans ses grandes lignes à faciliter la visibilité, l’accès et la qualité de l’orientation en s’adressant non plus à des publics spécifiques mais à tous les publics. » (p 2), et un peu plus loin : « L’orientation relève de l’ensemble des activités qui visent à aider les individus, à tout moment de leur vie, à faire un choix d’éducation, de formation et de profession. » (p 2)

La définition européenne est : « un processus continu d’appui aux personnes tout au long de leur vie pour qu’elles élaborent et mettent en œuvre leur projet personnel et professionnel en clarifiant leurs aspirations et leurs compétences par l’information et le conseil sur les réalités du travail, l’évolution des métiers et professions, du marché de l’emploi, des réalités économiques et de l’offre de formation ».

Le SPOTLV a donc à mettre en œuvre des services aux personnes et non des dispositifs d’orientation des personnes. C’est là une différence essentielle.

La dynamique régionale

Le CAS remarque que la mise en œuvre sur le territoire du SPO est très diversifiée. Elle s’est surtout appuyée sur la préexistence d’une dynamique locale, régionale. C’est à dire que ce sont les régions qui furent dynamique en l’occurrence avant l’objectif du SPO, alors que l’état maintenait le jeu différentiel de ses différents réseaux. J’ai déjà abordé cette question à propos de la démarche de labellisation :
« Vu le peu d’empressement de ces diverses hiérarchies à soutenir la demande de leurs unités locales, on peut se demander si elles-mêmes se sentent tenues de favoriser, d’inciter, de réclamer, cette participation ?
C’est le problème, sans doute éternel, de l’application d’une politique interministérielle (en France, mais seulement en France ?) : chaque administration attend une manifestation claire de son ministre de tutelle… qui lui-même attends un ordre précis du Premier ministre… Et comme ces politiques se font en général sans moyens supplémentaires propres, chaque administration freine, sans freiner ouvertement, mais très pratiquement, la mise en œuvre qui aboutirait à « détourner » ses moyens propres liés à ses « propres » objectifs.
Ce n’est là qu’un simple constat assez classique de sociologie administrative. » Post publié le 1/7/2011 .

Ce point n’est pas particulièrement développé dans cette note. Il est pourtant fondamental. L’état légifère pour instituer le SPO, mais ne donne aucune directive à ses propres acteurs. Pire, ceux-ci perçoivent ce silence comme le signe que l’état veut se débarrasser d’eux ou procéder à des dégraissages ou des fusions ; ce qui « explique » le peu d’enthousiasme des personnels de terrains. Et ici je ne parle pas que des personnels de l’éducation nationale. Ceux des Missions locales sont également très inquiets.

Les recommandations

Le CAS propose ensuite une série de recommandations. Toutes supposent et développent l’autorité et le pouvoir du DIO. Le Délégué à l’information et à l’orientation chargé d’élaborer une politique nationale en ce qui concerne l’orientation, créé par la loi du 24 novembre 2009 relative à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie 2004. Les propositions du CAS sont formulées sans prendre en compte certaines déclarations politiques (peut-être trop récentes) concernant le rôle des régions en tant que pilote d’un SPOT (T pour territorial), et le projet qui concerne les personnels d’orientation de l’éducation nationale. Curieux !
Voici ces axes :
Axe 1 : une nécessaire clarification du pilotage national du SPO
« La conception des normes de qualité du SPO établie(24), l’action du DIO pourrait s’articuler autour des deux missions suivantes : l’accompagnement et l’évaluation des structures labellisées. Cette organisation des missions viserait ainsi à positionner le DIO, d’une part, comme un garant des principes du service public par l’entremise d’une évaluation du processus de labellisation et, d’autre part, comme une instance de réflexion, d’appui et de capitalisation des expériences innovantes sur le terrain. » (p. 6)

  • accompagner et outiller les structures et les professionnels de l’orientation
  • piloter l’évaluation des structures labellisées
  • assurer des moyens financiers pour les structures labellisées

Axe 2 : encourager une animation territorialisée du SPO
« Ce positionnement laisserait ainsi une place prépondérante aux CCREFP dans le pilotage et la conduite des politiques d’orientation. »

  • adapter les politiques d’orientation au contexte local
  • organiser la coordination des structures autour du parcours des usagers
  • La mise en cohérence des activités en direction du public

Axe 3 : informer les usagers sur les débouchés des formations et les perspectives d’emploi
Il s’agit de « Rendre disponibles sur le portail “Orientation pour tous” des informations sur les débouchés des formations et former les professionnels de l’orientation à leur usage. » (p. 10)

Donc pour résumer la situation

Un DIO (via la note du CAS) cherche à développer le SPO par une amélioration de son rôle central dans le contrôle du développement du dispositif. D’un autre côté, les régions seraient prêtes (peut-être pas toutes) à prendre la responsabilité de la coordination du SPO sur leur territoire. Et enfin l’un des ministères, le MEN, important dans le dispositif, cherche à se défaire de ses personnels spécialisés dans l’orientation et sans doute les plus qualifiés professionnellement.

Très, très curieuse situation !

Bernard Desclaux

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Doctrix

Le CAC 40 et les 0 docteurs

Après l’enquête sur les sites emploi et le doctorat, Doctrix a décidé de s’intéresser aux plus hautes sphères de l’économie. Et là aussi, ça fait mal pour les docteurs.

Car côté CAC 40, 0 docteur ! Pour diriger l’une des 40 entreprises françaises côtées en bourse, mieux vaut tenter l’X, HEC ou l’ENA (certains cumulent). Et si vous êtes une femme, arrêtez les études ! Elles ne vous serviront à rien puisque zéro femme à l’horizon du CAC. Alors, une femme docteure…

Traversons le Rhin : 15 « Dr » sur les 30 CEO des entreprises cotées au DAX 30. Mais toujours zéro femme.

En considérant le verre à moitié plein (soyons optimiste !), force est de constater que la marge de progression est grande en France. Alors cher(E)s docteur(E)s, sachez valoriser vos compétences… tout au long de votre carrière !

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Jean-François Fiorina

L’information 2.0 comme moteur du changement (Ecole du futur, épisode 3)

J’ai abordé la question de l’école du futur par ses cercles extérieurs. La semaine dernière, nous nous sommes intéressés aux communautés qui composent l’écosystème des établissements (environnements socio-économique et associatif, parents d’élèves…). Aujourd’hui, ce sont les nouveaux médias et outils de communication qui nous occupent en proposant une manière inédite de produire, de partager et de diffuser l’information éducative. Nous passerons bientôt le seuil de la porte de l’établissement (réel ou virtuel !) et entrerons progressivement dans la salle de classe…

SoLoMo éducation. La mutation numérique en mode – social, local, mobile -, nouveau paradigme lancé par le bloggeur Loïc Le Meur en décembre 2011, impacte radicalement le monde des médias de l’enseignement. On assiste à  une segmentation de plus en plus fine des publics et des thématiques, même si les magazines spécialisés et les publications traditionnelles (enquêtes, palmarès, classements) restent forts. C’est sur le mode participatif que ces nouveaux médias sociaux se lancent comme Trendy du groupe L’Etudiant avec un objectif : imbriquer le plus intimement possible lectorat et média. Un espace où la frontière vie publique-vie privée s’atténue.

D’ailleurs parlera-t-on encore de lectorat au sens strict sur ces plateformes ? Ne seront-elles pas jaugées à l’aune de leur trafic, du nombre de leurs blogueurs affiliés et influents, de leur empreinte sur les tendances, les modes, le débat, de leur capacité à mobiliser sur les thématiques du moment, sur l’internet et les réseaux sociaux ? Dans la même perspective, je citerai, le Lab’éducation du Figaro Etudiant, défricheur des dernières nouveautés en matière d’éducation et des controverses autour du futur de l’enseignement ou Le Parisien Education. Toutes ont des déclinaisons locales, du moins sur les grandes villes universitaires. Toutes croisent les informations produites par les journalistes garants de la qualité et de la ligne éditoriales, les experts, les étudiants, les professionnels de l’éducation.

Les télévisions développent également leurs plateformes spécialisées. France Télévisions vient de lancer Francetv éducation pour les parents, les élèves et les enseignants, nouvelle formule qui se substitue à Curiosphere.tv de France 5. Canalsat Campus se présente comme la chaîne de la recommandation éducative et d’une nouvelle manière d’apprendre… de la 6ème à la Terminale.

Sans parler des sites « historiques » qui réussissent leur passage au « social » comme L’Etudiant ou Educpros sur lequel je m’exprime régulièrement !

Entrer dans le cercle. Pour les écoles, cette modification du paysage médiatique n’est pas neutre. Nous devons entrer dans le cercle de la création de cette information collaborative et interactive. Non seulement en apportant nos contributions à ces plateformes en terme d’information multi canal et multi cibles mais également en imaginant de nouveaux services pour les générations montantes.

Certains parlent déjà de la génération « Z » baignée des ressources de l’internet et du numérique dès leurs premières années. Comment consommeront-ils l’information éducative, comment vont-ils se former dans un environnement 100% numérique ? Des questions essentielles que l’école du futur doit penser en termes opérationnels très vite.

Nous entrons dans une logique du partage de l’information et de co construction des modèles de demain, l’information éducative au sens large n’y échappera pas. Nouveaux médias, étudiants, profs, parents, chaires thématiques comme Convergences que nous pilotons avec 2 autres écoles (Sciences Po, Supcréa) participent d’une même dynamique collaborative à des niveaux distincts mais complémentaires. La mutation des médias SO LO MO nous offre un terrain d’expérimentation exceptionnel pour l’école de demain !

A noter sur vos agendas, la tenue du Salon Educatec-Educatice à Paris (jusqu’au 23 novembre). J’en suis et rapporterai quelques informations intéressantes récoltées lors des conférences dans mon prochain post.

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Michel Abherve

Le beau programme de “la Droite Forte” concernant l’éducation

L’invraisemblable imbroglio autour du vote pour la présidence de l’UMP fait disparaitre toute analyse du vote par les adhérents de l’UMP sur les motions intervenu le même jour
Pourtant, il n’est pas neutre que la motion de la Droite Forte soit arrivée en tête, quand on lit ce qui est écrit concernant l’éducation pour “rétablir l’exemplarité de […]

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Claude Lelièvre

Jean-Paul Delahaye, un nouveau DGESCO

Le nouveau Directeur général des enseignements scolaires nommé ce mercredi 21 novembre a des origines, un parcours et des ‘’affinités électives’’ qui le distinguent nettement de son prédécesseur Jean-Michel Blanquer.

Jean-Paul Delahaye est né dans un milieu tout à fait modeste (son père a été ouvrier agricole). Il a débuté sa carrière professionnelle comme professeur d’histoire-géographie en collège pendant 9 ans. Il est devenu inspecteur départemental de l’Education nationale en 1982. Il a été directeur de l’école normale des Ardennes de 1986 à 1990 et a participé à la mise en place de l’IUFM. De 1991 à 2001, Jean-Paul Delahaye a été ensuite inspecteur d’académie et directeur des services départementaux de l’éducation successivement  dans les départements très disparates de Haute-Saône, de Côte d’or et  de la Seine Saint-Denis.  Devenu inspecteur général  de l’Education nationale (« vie scolaire’’), il a été chargé de mission au cabinet du ministre de l’Education nationale Jack Lang de mars 2001 à avril 2002, pour les questions de violence, les ZEP, la lutte contre l’exclusion et la grande pauvreté.

Il a préparé sous ma direction une thèse d’histoire de l’éducation qu’il a soutenue à Paris V le 6 décembre 2003 : « La franc-maçonnerie et l’instruction publique de 1861 à 1882 ». Il a obtenu la meilleure mention d’un jury composé d’Antoine Prost (professeur d’histoire contemporaine à Paris I) , de Jacqueline Lalouette (professeur d’histoire contemporaine à Lille III, spécialiste de l’histoire des relations entre l’Etat et les cultes, de la laïcité et de l’anticléricalisme) et de moi-même (professeur d’histoire de l’éducation à Paris V).

Comme l’a révélé publiquement « Educpros » le 17 mai 2012, Jean–Paul Delahaye a été mis en relation avec Vincent Peillon par mon entremise au début des années 2000 ; et leur collaboration ne s’est jamais démentie depuis.

Jean-Paul Delahaye a été professeur associé en histoire des politiques scolaires à Paris V de septembre 2004 à septembre 2011. Il a écrit (seul ou en collaboration avec d’autres auteurs) trois ouvrages parus chez Berger-Levrault en 2011 et 2012 (« L’autonomie de l’établissement public local d’enseignement », « Le conseiller principal d’éducation », « Conseils et commissions dans les établissements publics locaux d’enseignement ») et surtout, en novembre 2006, un livre paru chez Retz : « Le collège unique pour quoi faire ? », qui est tout un programme.

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Caroline Chanlon

Quand photos, bons plans et excellence déjouent Facebook !

Le nouveau taux de visibilité imposé par Facebook a semé le trouble chez les community managers. La part des personnes atteintes par nos posts a purement et simplement été divisée par trois … et tout cela en un coup de souris des grands décideurs Facebook, merci Mark ( Mais tout n’est pas si noir, car paradoxalement, les utilisateurs engagés, les personnes qui en parlent et la viralité ont quant à eux augmenté (en %, pas en volume). Un phénomène statistique qui peut nous laisser penser que nos posts partent vers nos membres les plus impliqués et les plus intéressés… (Vérité pour se rassurer ?!)

Certaines publications continuent toutefois de faire le buzz et nous rappellent les chiffres auxquels on s’était habitué avant l’intervention divine d’il y a quelques semaines. La solution du coup ? Faire des posts d’une super qualité qui seront partagés (car c’est bien ce que l’on cherche, augmenter notre portée!)

Et force est de constater que ces publications là qui fédèrent les foules, attirent la souris vers “J’aime”, “Commenter” ou “Partager” peuvent être rangées dans quelques grandes rubriques :

L’excellence

Les exploits sportifs ou de recherche sont sans aucun doute les plus grandes occasions de fédérer nos communautés. Nous en appelons clairement au sentiment d’appartenance et de fierté d’appartenir à une université. Hormis le bonheur qu’une victoire olympique ou un ERC starting Grant procurent, ce type de publications sont mes préférées dans la mesure où elles nous permettent réellement d’atteindre nos objectifs d’animation de communautés.

Le très bon plan

C’est avec surprise que j’ai constaté un pic de fréquentation phénoménal sur une actualité mettant en avant un dispositif de la ville de Dijon. Ce simple lien permettant aux étudiants de déposer un dossier pour un job étudiant a généré un trafic de grande ampleur ! Car Facebook ne le mesure peut être pas mais le trafic généré sur nos sites web sont des indicateurs de grande importance et de grande pertinence.

Les photos anciennes

Connaitre les origines de son université, les personnes qui ont contribué à sa construction semblent être des informations forts appréciées par nos cibles notamment étudiantes. Le charme de la photo N&B un peu froissée même si elle est numérisée agit toujours !

Mais aussi : les publications qui n’ont pas forcément un lien direct avec la communication institutionnelle mais qui bénéficient d’un intérêt fort de la part de nos communautés. Je pense par exemple aux journées mondiales, comme la Journée de la femme au cours de laquelle j’avais demandé aux étudiantes de l’uB de cliquer sur J’aime pour témoigner de leur soutien (je vous laisse également imaginer les messages d’opposition!). Et en terme d’objectifs, c’est nettement moins bien, on est plus ici sur des objectifs de recrutement…

Quelque soit le type, il nous faudra encore trouver de bonnes et nombreuses idées pour interpeler, fédérer, recruter et cela avant un nième coup stratégique de Facebook !

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Universitas

Comment réussir des Assises du supérieur ?

Peu auraient parié il y a encore quelques mois sur la destinée des Assises de l’Enseignement supérieur et de la recherche. Promises par la candidat Hollande lors de la présidentielle et lancées en plein cœur de l’été, ces “assises” doivent porter le pays vers l’après-LRU.

Après une première phase de consultation de juillet à septembre, des débats territoriaux se sont ouverts en octobre préfigurant les assises nationales de la semaine prochaine. Un rapport doit être remis en décembre et une nouvelle loi-cadre doit être soumise au parlement en début d’année prochaine.

Le comité de pilotage présidé par Françoise Barré-Sinoussi a publié, après sa première série d’auditions, (plus d’une centaine à ce jour), une note de synthèse qui recense tout à la fois des problématiques qui ne font pas vraiment débat (la simplification des structures, la coopération des acteurs, la démocratisation de l’offre…) et d’autres qui posent encore question (le rééquilibrage territorial, la sélection, les droits d’inscription…).

La composition dudit comité était déjà un modèle d’équilibre entre les tenants de l’ouverture internationale, ceux de la “culture entreprenariale”, les chantres de l’innovation et une aile plus réformatrice. Les corps intermédiaires, mis à mal lors du précédent quinquennat, y sont largement représentés, comme le conseil économique, social et environnemental.

Ce genre de grande consultation vise essentiellement à renouer le dialogue, après cinq années de compétition à marche forcée, dont on a déjà souligné ici le bilan et les inégalités de traitement qu’il a durablement installées dans le paysage. Mais au-delà, que peut-on en attendre ?

Le nombre des contributions (près de 1200 à ce jour !) montre l’engouement qu’a suscité cette nouvelle dynamique. Ce n’est pas le moindre des succès d’avoir au moins libéré la parole, même si l’abondance rend la lecture et l’analyse de tous ces documents plutôt ardue.

Cette attente – dont on remarquera au passage que la traduction médiatique est pour le moins discrète – imposera de trouver demain un “point d’équilibre”, comme l’appelle la Conférence des présidents d’université, à la fois adapté au terrain et capable d’être porté par une majorité. Rien ne serait pire en effet qu’un catalogue de conclusions fourre-tout, abstraites ou à un simple retour en arrière.

Les précédentes consultations du même genre, dans les années 80 et au début des années 2000, n’ont guère eu de traduction concrète immédiate. L’ambition de cette édition 2012 est au contraire d’en tracer la perspective. Et dans le contexte actuel, au moment où le ministère annonce une augmentation des moyens pour 2013 inférieure ou très légèrement supérieure à l’inflation, la voie est plus qu’étroite…

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Stéphan Bourcieu

Classements et groupes stratégiques

Le début du mois de novembre est traditionnellement la période des prix littéraires… et des classements des Grandes Écoles de management. Comme chaque année, c’est le Palmarès des Grandes Écoles de L’Étudiant qui ouvre le bal. Étant doublement partie prenante (école classée et blogueur Educpros), je ne commenterai évidemment pas dans ce post les résultats de ce classement.

Toutefois, en qualité d’enseignant-chercheur en management stratégique, je ne peux m’empêcher de m’intéresser à la méthodologie de ce Palmarès. Car après tout, un tel classement est le résultat d’une analyse stratégique d’un secteur d’activité concurrentiel. À ce titre, trois points du Palmarès méritent d’être soulignés concernant les évolutions récentes de notre secteur et leurs conséquences sur la méthodologie du classement :

Deux dimensions clés

En premier lieu, il faut noter la stabilité dans le temps des dimensions clés du Palmarès. Depuis plusieurs années, il se décompose en deux sous-classements : l’excellence académique et la reconnaissance par les entreprises. Ces deux dimensions sont considérées comme celles ayant le plus d’impact par L’Étudiant, même s’il faut préciser qu’elles intègrent largement une troisième dimension, à savoir l’international (professeurs internationaux, double-diplômes accrédités, partenaires étrangers, rayonnement dans la presse internationale ou encore pourcentage de diplômés travaillant à l’étranger, soit 40 coefficients sur 200 dédiés à l’international).

L’évolution vers des ratios

Jusqu’à présent, L’Étudiant qualifiait la dimension académique à partir de données prises en valeur absolue (nombre de professeurs permanents, nombre d’étoiles CNRS”, etc.).

Cette année, il faut souligner que la méthodologie de L’Étudiant connaît une évolution importante (et lourde de conséquences), avec l’introduction de ratios pour analyser la ressource clé que constitue le corps professoral :
Encadrement groupe (coef. 10) : nombre d’élèves par professeur permanent, à l’échelle du groupe,
Productivité de la recherche (coef. 5) : nombre des “équivalents étoiles” attribués aux articles de recherche par les professeurs permanents.

Pourquoi une telle (r)évolution ? On peut penser que les phénomènes actuels de concentration des Grandes Écoles de management (Skema hier, Kedge et FBS aujourd’hui, RMS-RBS demain) n’y sont pas étrangers. En effet, ces fusions conduisent à des ensembles de taille importante, additionnant les professeurs, les “étoiles CNRS” et les élèves et feraient presque passer les Grandes Écoles parisiennes (HEC, ESSEC, ESCP, etc.) pour de petites écoles, par la taille tout du moins.

L’introduction de ratios fondés sur le nombre de professeurs permanents permet de rétablir l’équilibre entre la ressource disponible et son usage effectif. Avec une telle approche, ce ne sont pas les écoles les plus grosses par la taille qui l’emportent, mais bien les mieux dotées financièrement.

L’identification de groupes stratégiques

Enfin, pour la troisième année consécutive, le palmarès a recours à la notion de groupes stratégiques pour établir une hiérarchie des écoles. Les groupes stratégiques sont définis comme des “sous-ensembles de concurrents partageant des caractéristiques stratégiques similaires et stables dans le temps et de distinguant d’autres groupes aux caractéristiques différentes.” *

L’Étudiant distingue ainsi trois groupes stratégiques indépendants (voir le mapping élaboré par le magazine) :
Groupe 1 “l’Elite”, est composée de 5 écoles “ayant une large avance sur tous les critères”,
Groupe 2 “les Incontournables”, qui regroupe 15 écoles “bien connues des étudiants et des recruteurs, installées dans des grandes villes et qui ont les moyens leur permettant de disposer de campus confortables”,
Groupe 3 “les Valeurs sûres”, qui rassemblent 16 écoles “plus accessibles et plus performantes sur l’aspect professionnel que sur l’aspect académique.”

Il faut noter que, sur la base des Palmarès 2010, 2011 et 2012, il ressort que ces trois groupes sont finalement assez stables dans le temps.

Le recours au concept de groupes stratégiques facilite pour un candidat l’identification des écoles présentant des caractéristiques comparables et donc susceptibles d’être en concurrence directe. Mais surtout, il relativise la notion de hiérarchie au sens strict.

Autant la hiérarchie inter-groupes existe (ce sont les groupes stratégiques) et est relativement peu discutée, à l’exception probablement des écoles qui s’estiment à la frontière entre deux groupes. Autant la hiérarchie intra-groupe pourra fluctuer en fonction des priorités des étudiants :
• Les groupes stratégiques (et plus encore leur représentation graphique) montrent qu’il est illusoire de considérer qu’il existe des différences majeures entre une école classée 14ème et une école classée 15ème sur la seule base du classement général,
• En revanche, il peut exister des différences importantes entre ces deux mêmes écoles sur des critères précis, qui font que la première aura par exemple une expertise plus grande en marketing tandis que la seconde sera beaucoup mieux reconnue dans les métiers de la finance,
L’Étudiant souligne également qu’au sein d’un même groupe stratégique “d’autres facteurs entrent en ligne de compte : les parcours proposés, la ville ou l’ambiance.”

On peut penser que cette approche par les groupes stratégiques devrait amener les étudiants à réfléchir moins en termes de classements que de spécificités des écoles. Autant d’éléments qui devraient inciter ces dernières à raisonner en matière de différenciation plutôt que de course à la taille.

* Garrette Bernard, Pierre Dussauge et Rodolphe Durand (coord.), “STRATEGOR”, (2009), p. 107

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Yves Poilane

Innover, c’est maintenant !

Il y a tout juste 10 jours, à l’issue du conseil des ministres du 7 novembre, la ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche a proposé, parmi les « 15 mesures pour améliorer l’impact économique de la recherche publique », de créer « un cours dédié à l’innovation et à l’entrepreneuriat dans toutes les formations de l’enseignement supérieur » à la rentrée 2014.
En tant que Directeur d’une école dont la devise est « innover et entreprendre dans un monde numérique » (Télécom ParisTech) et Président d’un PRES de grandes écoles d’ingénieurs et de management, parmi les plus « grandes » (ParisTech), pour lesquelles le développement de l’innovation et de l’entrepreneuriat est l’une des priorités, je voudrais rebondir sur cette annonce  ; tout d’abord pour revenir sur ma vision de l’urgence qu’il y a à agir ; puis pour partager notre expérience et aussi nos questionnements en matière de formation à l’innovation dans l’enseignement supérieur en particulier et dans l’enseignement en général.

Bien sûr, il y a urgence !


Les exigences du monde du travail ont changé. Les grands groupes ont gardé le même nom, mais leurs besoins ont fondamentalement évolué (ref1) . A partir du moment où leur survie provient de leur capacité à renouveler les produits plutôt qu’à les perfectionner, à provoquer de nouveaux usages plutôt qu’à se conformer aux usages existants, à sauter sur les nouvelles vagues technologiques plutôt que de dérouler des roadmaps,… il est évident qu’il nous faut développer chez nos ingénieurs et scientifiques des compétences supplémentaires, au-delà de l’excellence scientifique. Et, puisqu’il s’agit également de former des entrepreneurs, notre mission devient, en plus, de développer  l’envie de créer, un goût du risque, la curiosité interdisciplinaire et un pragmatisme à toute épreuve… autant de traits qui ne comptent pas parmi les principales caractéristiques de la formation supérieure traditionnelle.
L’excellence scientifique : une condition nécessaire peut-être, suffisante certainement pas…
Car former d’excellents scientifiques ne suffit plus. Et, si, pour être visible mondialement, il faut avoir des prix Nobel, des médailles Fields parmi les professeurs et les diplômés, s’il faut avoir plus généralement un très haut niveau d’activité scientifique par enseignant-chercheur, il est manifeste que les très grandes universités scientifiques mondiales sont aussi celles qui ont su contribuer activement au développement de l’innovation en leur sein et dans leur écosystème (pensons au MIT avec le MediaLab, à Stanford à qui Google doit beaucoup…). Et, même si l’innovation de rupture ne peut venir que d’une recherche d’un niveau scientifique très élevé, ce serait une erreur de penser que cette condition nécessaire est … suffisante.
De la même manière, s’il est indispensable qu’un plus grand nombre de nos plus brillants jeunes étudiants en sciences, technologies et management poursuivent leurs études par un doctorat, s’il est certain que le doctorat stimule l’autonomie, favorise la remise en question, apprend à sortir des fausses pistes (autant de qualités nécessaires à un innovateur)… il ne faut pas croire que la seule augmentation des « ingénieurs-docteurs » suffira à doper le potentiel d’innovation de notre pays.
Cette augmentation devra aussi s’accompagner du développement d’une posture collective (des doctorants, de leurs directeurs de thèse, de leurs patrons de laboratoires) encore plus positive à l’égard de la transgression, de la prise de risque, de la recherche de nouveaux paradigmes en rupture par rapport aux écoles de pensée installées… mais aussi, çà ou là, à l’égard du monde de l’entreprise et de l’économie de marché.
Innovation et entrepreneuriat : l’enseignement supérieur français ne part pas de zéro, loin de là ! Ce qu’il lui faut maintenant, ce sont des moyens…

Le politique a décidé de se saisir de cette question, et on ne peut que s’en réjouir. Mais, considérant la multitude d’initiatives prises par les établissements depuis plus de 10 ans dans le domaine, son rôle est à mon sens moins d’imposer un dispositif nouveau que :
-d’une part, de s’inspirer des expériences et pratiques existantes pour en faciliter la généralisation, par le partage d’expérience et surtout par la mise à disposition des moyens humains et financiers permettant cette généralisation ;
-d’autre part, de soutenir les initiatives innovantes des établissements pour aller encore plus loin, puisque, comme on le verra, les idées les plus avancées n’ont pas toutes été encore mises en œuvre même dans les établissements les plus en pointe.
Ainsi, considérons les dispositifs désormais bien ancrés dans les grandes écoles, par exemple au sein des écoles de ParisTech : le réseau PIMREP (ParisTech Innovation Management Research and Education Programme) a inventorié ces dispositifs au travers de son premier libre blanc en 2009 (www.telecom-paristech.fr/pimrep/ ) avec les programmes mis en place par IOGS, ESPCI ParisTech, Mines ParisTech, Polytechnique, HEC Paris ou Télécom ParisTech, pour ne citer que les écoles les plus en pointe.
Considérons le dispositif « Pôles de l’Entrepreneuriat Etudiant », lancé en novembre 2009 par le MESR, avec pour objectif « de développer …des outils de sensibilisation, de formation et d’accompagnement afin de promouvoir l’envie d’entreprendre, l’esprit d’innovation et le sens du risque » chez les étudiants du supérieur ; et considérons ce qui a été fait dans le cadre de P.E.E.P.S., projet lauréat de ce dispositif pour Paris-Saclay, rassemblant Grandes Ecoles (dont celles de ParisTech) et universités (celles partenaires de l’Université Paris-Saclay) http://www.u-psud.fr/fr/peeps.html.

Enormément de choses sont donc déjà faites pour stimuler l’innovation et l’entrepreneuriat, mais, à l’heure où le budget de l’enseignement supérieur n’est plus prioritaire pour l’Etat français, à l’heure d’une réduction de près de 12% du budget de fonctionnement de mon école et de 2,5% de son cadre d’emplois pour 2013 (et cette situation n’est pas atypique au sein des Grandes Ecoles), comment peut-on poursuivre ces initiatives et, a fortiori, les amplifier ? Il est indispensable que l’Etat dégage des ressources spécifiques pour l’enseignement supérieur sur ce seul objectif. Ce n’est pas le cas pour 2013.

Quels enseignements en tirer ? Comment aller plus loin ?

 
Tout d’abord, que l’innovation et l’entrepreneuriat passe par des projets inter-établissements. Les projets ont en effet, de l’expérience de leurs initiateurs, tout à gagner, à la fois pour leur performance intrinsèque et pour leur vertu pédagogique, à être réalisés dans un cadre multi-école. Ce cadre intégrant plusieurs spécialités (ingénieur, gestionnaire, designer, artistes) et plusieurs cultures (sociales, nationales,…) constitue clairement un stimulateur de la créativité, une invitation à penser « out of the box »…

A cet égard, les regroupements institutionnels en cours sont une opportunité exceptionnelle pour rendre possible ces aventures, dans le cadre des Initiatives d’Excellence. Mais au cas particulier de l’Ile-de-France, eu égard à la distribution géographique des compétences d’établissements sur les différents domaines pertinents, il est indispensable que chaque IDEX/Campus veille à développer des coopérations avec ses voisins hors campus. Ainsi pour Paris-Saclay, la coopération avec les grandes écoles de design franciliennes (toutes dans Paris Intra-muros) et avec les grandes universités des arts et lettres (présentes dans Paris Intra-muros également) sera de plus en plus indispensable.

En outre, sur ce point comme sur d’autres, l’enfer est dans les détails. La généralisation de projets communs inter-établissements bute aujourd’hui sur un principe de réalité, qui est celui de l’absence de concordance des emplois du temps, rendant quasiment impossible d’organiser des projets communs dans les cursus, sauf le soir et week-end ! Les établissements ont réussi à se coordonner pour dégager le jeudi après-midi pour le sport, ne pourrait-on pas faire de même pour un objectif national comme celui de former des innovateurs ?

Enfin, je retire également de nos expériences qu’il est certainement urgent de mettre en place un référentiel puis un système de certification pour les formations à l’innovation. Non pas pour complexifier le système, mais pour permettre aux différents acteurs (écoles, universités, étudiants, entreprises) de se repérer dans un référentiel stabilisé afin de dépasser le flou ambiant qui veut que tout le monde forme à l’innovation, et que du coup personne ne le fait. L’explicitation de référentiels, voire de labels déclinés dans les différents secteurs de formation, permettrait de s’y retrouver. PIMREP a ouvert la voie, en proposant une typologie dans son livre blanc (référence plus haut), qui pourrait alimenter d’utiles réflexions au niveau du MESR.

Quelle limite au rôle de l’enseignement supérieur dans cette ambition de rendre la France plus innovante ?

Selon moi, l’innovation et l’entrepreneuriat en France ne se développeront pas seulement par la vertu de simple « cours » (même dans une acception plus large de « dispositif pédagogique »), ni même de projets menés dans le cadre d’une « pédagogie active », dans l’Enseignement Supérieur. Il s’agit bien aussi de faire évoluer les comportements,  les attitudes, les mentalités des étudiants et de leurs enseignants, pour stimuler leurs actions innovantes et entrepreneuriales.

Au-delà de celui de la nécessité d’une cohérence entre l’ambition politique et les moyens de cette ambition, je tire deux enseignements personnels de nos expériences.

Ce que nous pouvons faire dans les 3 à 8 ans pendant lesquels nos étudiants fréquentent nos établissements ne peut dispenser d’une réflexion sur ce qui doit être fait dans les 15 années qui précédent, période clé de la construction des personnalités. A cet égard, pour toute personne qui a pu prendre connaissance de la façon dont l’enseignement est dispensé aux Etats-Unis, le contraste est saisissant.

Sans faire de l’enseignement américain un modèle (car il a ses limites, voire ses lacunes en terme d’apprentissage des savoirs de base), l’approche du rapport enseignant-enseigné, la place faite à l’élève agissant, la place des activités créatives, le rapport à l’erreur, sont autant de caractéristiques de ce système qui font certainement plus pour l’innovation aux Etats-Unis que n’importe quel cours sur l’innovation ou n’importe quelle thèse de doctorat.

Alors n’est-il pas urgent que nos deux ministres de « l’éducation » (au sens large) se penchent ensemble sur cette question, qui est bien une priorité nationale ?

 

ref 1 : Midler Christophe, Maniak Rémi et Beaume Romain 2012. Réenchanter l’Industrie par l’Innovation. Paris. Dunod

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Jean-Luc Vayssière

La non-sélection universitaire, cache-sexe qui donne la prime à une sélection féroce

Si les universités doivent faire de leur mieux pour attirer les étudiants dès la première année, ces efforts doivent s’intégrer dans une remise à plat globale de l’orientation post-bac en France. C’est pourquoi je me félicite de l’attention portée par notre gouvernement et nos recteurs à la séquence -3/+3,  qui forme une unité pertinente.

Mais je voudrais rappeler une évidence trop souvent oubliée dans le débat public : si la première année universitaire (L1) connaît un taux d’échec important, c’est aussi qu’elle est la seule filière gratuite et ouverte à tous les bacheliers et toutes les bachelières, et qu’elle est la moins bien financée de toutes les poursuites d’études possibles !
Il y a une injustice fondamentale dans la dénonciation, courante aujourd’hui dans la société française, des résultats obtenus par l’université en licence. Etant donné l’inégalité foncière du système français, qui met en concurrence les classes préparatoires, les filières comme le BTS, les écoles et les universités, je trouve au contraire qu’on ne peut qu’admirer le travail pédagogique réalisé par les équipes de nos établissements dans des conditions souvent difficiles.

Cette situation pose cependant une question de fond : est-il sain pour la société française que l’orientation des étudiants repose sur une série de déséquilibres dont l’université finit par être la variable d’ajustement ? Est-il normal que des bacs professionnels destinés à alimenter les filières courtes (BTS) conduisent à des filières universitaires générales ? Est-il cohérent de soustraire chaque année, en sciences ou en lettres, les meilleurs étudiants pour les inscrire dans un système prolongeant le lycée, encadrés par des enseignants, alors même qu’il existe à l’université des formations de haut niveau dispensées par des enseignants qui sont aussi des chercheurs ?

Il me semble que c’est l’ensemble du système d’orientation des étudiants à partir du bac qui nécessite une réflexion collective. Du côté de l’université, je l’ai déjà dit, il faudrait à la fois pouvoir développer la prise en charge des étudiants plus faibles et accueillir dans des cursus nouveaux les étudiants à la recherche d’une formation intensive de haut niveau. Mais il serait également souhaitable que les inégalités de la formation à la française, qui sont coûteuses, injustes socialement et souvent contre-productives scientifiquement, soient enfin réduites. L’articulation entre les écoles et les universités mérite réflexion, de même que la situation des classes préparatoires et des BTS, dont on pourrait souhaiter à terme l’intégration dans les universités. Enfin, la question de la sélection doit être posée à l’ensemble du système, pour éviter que la non-sélection universitaire, louable au demeurant, ne soit que le cache-sexe d’un fonctionnement global qui donne la prime à une sélection féroce, condamnant l’université au rôle de supplétif, à l’inverse de ce qui se passe dans le reste du monde.

Il est temps que la société française affronte vraiment la question de la formation des jeunes qui sortent du bac (censé sélectionner), plutôt que de se satisfaire d’une situation bancale qui fait reposer sur un seul acteur, l’université, la part la plus difficile de l’effort, sans lui donner tous les moyens d’assumer pleinement son ambition de formation en premier cycle, alors même qu’elle serait en théorie la mieux placée pour le faire.

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Gilles Gleyze

La valorisation : nouvelle frontière pour l’Enseignement Supérieur ?

Je reviens d’une tournée en Californie, durant laquelle j’ai rencontré des mécènes de l’Ecole Centrale Paris, mais également des équipes de Stanford et de Berkeley, et des structures d’accompagnement à la création d’entreprises.

Ma tête est pleine de souvenirs, mais j’aimerais aujourd’hui m’arrêter sur un rendez vous avec un interlocuteur de Berkeley, en charge de ce qu’en France nous appellerions la valorisation.

Mon interlocuteur, (un vrai virtuose de Powerpoint, à l’Américaine), m’a fait une présentation très complète de la manière dont Berkeley s’assure que les résultats de la recherche irriguent l’activité économique et sont transférés vers les entreprises.

J’ai été frappé par le caractère complet et structuré de la démarche ; nous connaissons également l’ensemble de ces dispositifs en France, mais à une échelle généralement plus petite, plus fragmentée. Le dispositif de Berkeley se développe sur plusieurs fronts :

la recherche contractuelle, faite avec des entreprises ; aux US elle n’a pas forcément la préférence des chercheurs, car ils lui préfèrent les appels d’offres, notamment ceux des grandes agences fédérales, qui leur laissent plus de liberté dans les thématiques de recherche, et dans la gestion de la propriété intellectuelle.

La création d’entreprises, qui est bien sûr l’un des points forts des universités californiennes. Comme en France on y trouve une grande variété de situations, depuis l’entreprise portée par des étudiants, très entrepreneuriale et peu connectée aux laboratoires ; jusqu’à la start-up créée par un chercheur, sur la base d’un brevet qu’il a déposé.
Ce qui frappe là bas, c’est la masse des start-ups créées, et la proportion d’étudiants dans chaque promotion de Masters qui se lancent dans la création d’entreprise.

La vente de propriété intellectuelle : cette activité repose sur une stratégie de dépôt de brevets, afin de constituer des familles cohérentes et attractives pour des industriels ; et sur la maturation de ces brevets, afin de les protéger juridiquement, connaître leur potentiel marketing, et passer d’un brevet à une technologie commercialisable.

C’est ce 3ème volet de la valorisation qui m’a le plus interpelé. C’est probablement celui qui, selon mon expérience, est le plus difficile pour nos établissements.  Même aux US : si certaines universités américaines affirment se financer massivement par ce biais, cette activité semble rester à un niveau modeste à Berkeley : une équipe de 5 personnes pour vendre la PI (Propriété Intellectuelle), et moins de 1% des revenus de la School of Engineering.

En France (et l’Ecole Centrale Paris ne fait pas exception), la valorisation de la PI reste le maillon faible des processus de valorisation. La recherche contractuelle est souvent bien développée (Armines, Centrale Recherche SA etc …) ; la création de start ups atteint aujourd’hui la maturité (10% d’une promotion de Centraliens par exemple) ; mais la valorisation de la PI continue à se heurter à des difficultés nombreuses :

le coût d’une politique brevets : être attractif pour un industriel, c’est souvent couvrir un champ thématique complet ; c’est une condition de solidité de la PI (les brevets se soutenant les uns les autres). Voyez par exemple les portefeuilles brevets d’entreprises comme Technicolor, ou Orange : leur force réside dans leur nombre, leur cohérence et l’étendue du champ qu’ils couvrent. Cela signifie des dépôts nombreux, soutenus dans le temps, dans de nombreux pays. Cela peut être très coûteux.

le pay back très aléatoire et souvent très différé : le temps de constitution de familles de brevets, ainsi que la longueur du processus de maturation (invention / constitution de familles de brevets / maturation / négociation et vente / lancement et succès commercial du produit) amène à des pay back très longs, qui peuvent souvent dépasser 10 ans. Le grand nombre des étapes, qui sont autant d’obstacles, rend l’ensemble du processus très aléatoire : peu d’inventions arrivent au bout.

la diversité des compétences nécessaires pour la maturation : maturation marketing, technologique, juridique ; identification des partenaires, négociation et vente. La valorisation de la PI est nécessairement un travail d’équipe, qui engage des profils variés (et souvent assez coûteux).

enfin, la grande difficulté à identifier, au cœur même des laboratoires, les idées pouvant donner lieu à invention, brevet, innovation et finalement valorisation. La majorité de nos collègues se consacrent principalement à la publication ; tout le système d’évaluation et de reconnaissance etant basé sur ce principe. La valorisation par les brevets est parfois encouragée (au CNRS notamment), mais globalement, dans le monde universitaire, les chercheurs ont besoin d’être accompagnés pour traduire leurs travaux en idées de brevets ; ce travail de « détection d’invention » est un métier à part entière, qui suppose une intimité étroite avec les laboratoires.

Ma conviction est qu’une vraie politique de PI, en France comme ailleurs, suppose des structures importantes, bien financées, capables d’une vision long terme, et disposant d’équipes complètes. Une telle politique est rarement accessible à l’échelle d’un établissement ou d’une université, à l’exception probablement des grands organismes tels que le CEA, le CNRS ou l’INRIA.
L’Ecole Centrale Paris recourt aux services de l’équipe Valo du RTRA Digitéo, qui réalise un travail intéressant.

Le concept de SATT (Société d’Accélération du Transfert de Technologie), porté dans le cadre des Investissements d’Avenir, va également dans le bon sens : créer des structures de grande taille, bien capitalisées, et gérées dans une perspective à la fois « recherche » et « business ». Ces SATT doivent néanmoins définir leurs relations avec la multiplicité des structures qui existent aujourd’hui, afin de préciser leur valeur ajoutée dans le paysage français.

Pour l’Ecole Centrale, la mise en place d’une démarche de valorisation de la PI est l’un des enjeux de la création de la future Université de Paris Saclay ; la valorisation est l’un des champs dans lesquels la valeur ajoutée de la future université est la plus évidente.

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Universitas

Note de lecture

Les universités en France, fonctionnement et enjeux. – Le titre très général de cet ouvrage n’en donne pas toute la portée : la recension de ces contributions qui émanent d’acteurs de premier plan (certains conseillers de l’actuelle ministre notamment) offre en effet une nouvelle perspective sur l’enseignement supérieur.

Frédéric Forest rappelle très justement que la réforme du système universitaire, qu’il présente comme un système en réseaux, reste à faire et montre bien combien c’est la régulation des flux qui irriguent ces réseaux qui en sera la clef principale.

Il porte également une attention particulière à ce qu’il nomme des “points pivots”, des éléments du système qui ont des répercussions et donc un poids particuliers et sur lesquels la dynamique du système doit reposer.

Une contribution d’importance au moment où s’ouvrent des assises nationales destinées à dessiner le futur du supérieur en France…

Frédéric Forest (dir.), Publications des universités de Rouen et du Havre, juillet 2012

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Le Maroc construit le 1er hub de l’enseignement supérieur d’Afrique

L’enseignement supérieur se structure et s’intensifie au Maroc, ces 5 dernières années, avec notamment l’ouverture de campus d’Écoles et d’Universités étrangères et d’universités privées. La concurrence devient rude actuellement, pas moins d’une douzaine projets sont en cours de réflexion pour accueillir des Universités et Écoles étrangères (russes, italiennes, françaises, américaines, espagnoles) afin d’ouvrir des campus au Maroc. Ces différents projets ont été annoncés par Monsieur Daoudi, Ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et de la Formation des cadres. Sa Majesté Sérénissime le Roi Mohamed VI soutient aussi largement ces projets. Le Maroc se dote de moyens pour former les jeunes marocains sur son sol, afin de participer à l’innovation et au développement du pays, mais aussi en attirant les jeunes Africains pour contribuer à leur formation. L’Afrique étant un vivier important de jeunes à former. L’enjeu d’un tel projet, est clairement le développement économique du pays et le positionnement du Maroc comme hub éducatif. Ce hub pourrait aussi attirer des jeunes étrangers comme des européens dans l’avenir.

Le dernier projet en chantier, la Ville Verte, à proximité de Benguerir (située entre Marrakech et Casablanca), représentatif de cette politique vient d’être dévoilé par SMS le Roi Mohamed VI. Elle offrira un espace écologique et un cadre de vie favorisant la diversité et l’épanouissement social et culturel des habitants. Le socle central de cette ville sera l’Université privée Mohamed VI Polytechnique. A vocation internationale, elle accueillera des professeurs et chercheurs  marocains et étrangers de renom. L’Université est pensée pour  être le poumon et le moteur du développement de la ville. Elle sera un centre d’enseignement, de recherche et de développement, de transfert de technologie, d’incubations de projets innovants tout en étant en proximité avec les entreprises. Elle devra assurer aux étudiants une meilleure appréhension d’un monde globalisé et faciliter leur accès aux cultures étrangères. L’enseignement théorique qui sera dispensé sera complété par des stages. L’Université sera pluridisciplinaire et accueillera plusieurs écoles (management industriel, ingénieur, agriculture, business, architecture, santé, etc.).

Ces dix dernières années, de nombreux hubs éducatifs se sont développés dans les pays émergeant et plutôt en Asie et Moyen Orient (Singapour, Malaisie, Dubai, Abhu Dabi, Qatar, Chine,…). Ces derniers ont rapidement gagné en reconnaissance et notoriété, attirant de plus en plus d’étudiants étrangers, dont européens, qui y voient un moyen de s’ouvrir à d’autres cultures, et d’échapper une Europe en crise. Plus récemment et plus proche de nos frontières, on assiste à de nombreux projets accompagnés d’investissements importants comme l’Université du Luxembourg ou encore le Maroc. Les Universités et Ecoles  françaises doivent plus que jamais doivent accélérer leur ouverture internationale et développer leur notoriété et image au-delà des frontières pour ne pas rester en marge de ces évolutions importantes qui se déroulent à leurs portes.

Retrouvez moi sur Twitter @b_fournier et visitez le site de mon agence Noir sur Blanc

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Jean-François Fiorina

Travailler pour ses communautés (Ecole du futur, épisode 2)

L’école du futur recouvre un aspect moins connu, celui de vivre en relation de plus en plus étroite avec les communautés qu’elle sert. Objectif : coproduire du lien, du savoir, de l’échange. Une exigence de tous les instants pour être sûr de la valeur ajoutée de l’école à l’économie, aux entreprises, aux partenaires scientifiques et académiques, aux étudiants – hors enseignement stricto sensu.

Outil contributif. L’école de demain sera en lien avec des communautés de plus en plus variées avec lesquelles il faudra bâtir un relationnel personnalisé. En direction des entreprises, on imagine facilement le lien avec les promotions des étudiants de l’école à Grenoble, moins celui avec les étudiants du monde entier qui pourtant vivent au quotidien certains de nos cursus. C’est une véritable valeur ajoutée pour notre tissu économique. L’école de demain parle à des entités économiques, sociales, scientifiques, à ses partenaires mais également à des entités plus ciblées comme ses prospects, étudiants ou chercheurs. Le tout dans une logique complémentaire dans une tension locale et internationale. C’est bien le rôle d’une grande école que de s’inscrire sur des territoires et dans des communautés qui ne sont pas directement liés à la question de l’enseignement. Un peu comme un catalyseur qui déclenche ou accélère une réaction chimique !

Toutes n’ont pas les mêmes attentes vis-à-vis de nous, mais toutes nous intéressent de manière singulière. Fini le discours globalisant, place aux politiques spécifiques. Nous devons construire des lignes directrices fortes et évaluer l’impact que nous avons sur chacune de ces communautés. Si je prends l’exemple de notre écosystème économique, nous avons une vocation locale à incuber de jeunes start-up prometteuses qui s’installeront dans la région et créeront des emplois ; une vocation internationale à apporter aux grands groupes industriels high tech des idées de business modèles innovants ; une vocation nationale à fournir des talents à toutes les formes d’économie. Sur chacune de ces cibles, l’école de demain devra questionner ses apports concrets, leurs impacts et les évaluer. Construire sa propre assurance qualité en quelque sorte. Des paramètres qui influenceront, par exemple, le classement des écoles. Du moins je l’espère.

Risque de dispersion. A l’heure numérique, je vois l’ambition et la possibilité de construire des réseaux à l’infini comme autant d’opportunités et de risques. Le succès dans la durée pour une école passera par sa capacité à sélectionner et affirmer ses choix, à travailler des audiences et des sources ciblées. Par le numérique, nous disposons des outils pour les qualifier et nous aider à construire des communautés de qualité. Notre dimension internationale et numérique nous rapproche, un peu paradoxalement, de notre territoire géographique local et communautaire. J’en suis convaincu.

En poursuivant mes lectures sur la pédagogie de demain qui fait suite à mon précédent post, je vous propose deux articles à la lecture issus du Figaro étudiant :

Facebook réveille ceux du fond qui dorment !

On connaissant le Tableau interactif, voici l’amphi quizz…